La liberté d'expression, un droit fondamental

Pistes de réflexion et prolongements possibles pour travailler la question de la liberté d'expression en classe et son ancrage dans les enseignements disciplinaires.

Mis à jour : mai 2023

Pourquoi travailler la question de la liberté d'expression en classe ?

  • Parce que la liberté d'expression est une liberté fondamentale, qui doit toujours s'exercer dans notre République.
  • Parce que la liberté d'expression est la base du pluralisme, indispensable à notre fonctionnement démocratique.
  • Parce que la liberté d'expression concerne tout le monde sur notre territoire, qu'on soit citoyen français ou pas, pas seulement les journalistes ou dessinateurs de presse.
  • Parce que la liberté d'expression doit pouvoir s'exercer en toutes circonstances pour ne pas se réduire face à celles et ceux qui la remettent en cause.
  • Parce qu'en France, cette liberté se déploie dans le cadre de la loi, qui la protège et en souligne les limites nécessaires.
  • Parce que l'École forme les futurs citoyens aux droits et aux libertés qu'ils exerceront.
  • Parce que ce texte est lui-même une illustration de la liberté d'expression.

Téléchargez la tribune « Ensemble, défendons la Liberté »

La liberté d'expression est consacrée parmi les « droits naturels et imprescriptibles de l'homme » dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, plus précisément dans son article 11 qui en définit l'importance, le périmètre et les enjeux : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi ». Derrière cet article se retrouvent tous les enjeux liés à la liberté d'expression : depuis ce texte fondateur, nos sociétés ont eu à arbitrer entre la nécessité que cette liberté s'exprime pour chacun et en toutes circonstances pour garantir le pluralisme sans lequel elle n'existe pas et la question des limites à lui donner pour éviter des dérives violentes, sectaires et finalement liberticides.

Des réponses différentes ont été apportées selon les époques et les régimes politiques, faisant évoluer la définition et le périmètre de la liberté d'expression et se traduisant à chaque fois dans la loi. Derrière ce principe se trouve également un enjeu d'éducation majeur, avec la nécessité d'apprendre aux élèves à utiliser cette liberté, en s'exprimant librement tout en étant capable d'écouter et de comprendre d'autres opinions que les leurs, mais aussi en comprenant la nécessité que des limites communes soient fixées par la loi, limites pouvant faire l'objet de débats.

Dans quels enseignements disciplinaires ancrer cette réflexion ?

Les programmes de cycle 4 offrent de multiples possibilités d'aborder la question de la liberté d'expression avec les élèves.

En enseignement moral et civique

La question de la liberté d'expression est au cœur des programmes d'EMC. Le cycle 4 approfondit ces réflexions autour des finalités poursuivies depuis le cycle 2.

Dans le cadre de l'objet d'étude « Respecter autrui », les élèves ont l'occasion de mettre en avant leurs convictions, leurs sentiments moraux ou religieux et de les confronter à celles et ceux des autres pour en saisir la pluralité. Cela permet de comprendre la nécessité que chacun soit libre de les exprimer, mais également que certaines limites sont nécessaires pour respecter les sensibilités de chacun. La tribune peut être un support pour réfléchir à l'importance de cette liberté, mais aussi pour étudier l'articulation des différentes formes de liberté (comme la liberté d'exprimer une opinion, une sensibilité, et celle de la critiquer) et leur éventuelle conciliation. Cela pose donc la question des nécessaires limites de cette liberté et amène à réfléchir au rôle et au sens de la loi.

Les libertés d'expression et de la presse sont au cœur de l'objet « Acquérir et partager les valeurs de la République ». Dans le but d'« identifier et de reconnaître les libertés fondamentales » et de connaître « les expressions littéraires et artistiques et connaissances historiques de l'aspiration à la liberté », la tribune peut être mise en perspective pour définir la liberté de la presse comme une caractéristique fondamentale de la démocratie, mettre en perspective les combats menés pour la garantir et les nouveaux défis auquel elle doit faire face. Les liens avec les programmes d'histoire, notamment celui de 4e, sont nombreux.

Enfin, ces libertés sont au cœur de la construction d'une culture civique, notamment par la capacité à « exprimer son opinion et respecter l'opinion des autres dans une discussion réglée ou un débat réglé ». La liberté de la presse peut aussi être au cœur de la construction d'une culture de l'engagement et de la responsabilité, d'abord pour comprendre l'engagement que nécessite l'exercice de cette liberté, dans une démocratie comme la France et ailleurs dans le monde, mais aussi pour s'engager soi-même, par exemple par le biais d'un journal du collège.

Ces réflexions sont poursuivies dans le cadre des programmes de lycée : en seconde générale et technologique, la liberté est le thème central du programme, tout comme en seconde professionnelle. Les questions sur sa définition et les débats qui l'animent y sont enrichies, comme les modalités de discussion et de débat avec les élèves autour de ces questions.

Ressources à consulter

En histoire

La tribune repose sur trois références historiques bien identifiées.

La première est la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 juillet 1789, texte fondateur qui renvoie à la Révolution française, étudiée en classe de quatrième dans le thème 1 sous le titre « La Révolution française et l'Empire : nouvel ordre politique et société révolutionnée en France et en Europe ».

La tribune rappelle l'héritage historique qui nous permet de vivre depuis longtemps dans un pays où le délit de blasphème n'existe pas. Le premier Code pénal français, rédigé en 1791, suit la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et ne reprend pas le délit de blasphème, dès lors exclu du droit. Sous la Restauration, notamment de 1824 à 1830, alors que le catholicisme est redevenu la religion de l'État, cet acquis est remis en question : la loi Serre sur la presse de 1816 crée une infraction « d'outrage à la morale publique et religieuse ». Quand bien même la « loi sur le sacrilège » de 1825 n'a jamais été appliquée et a été supprimée en 1830, il faut attendre la loi sur la liberté de la presse de 1881 pour qu'il soit bien clair qu'il n'y a pas de limites à la liberté d'expression en matière religieuse.

Enfin, la Constitution de notre République est mise en avant comme la garante des libertés. Elle est étudiée en classe de 3e dans le thème « Françaises et Français dans une République repensée ».

Ces trois moments décisifs sont indispensables pour comprendre comment notre démocratie et nos libertés se sont construites. La liberté d'expression et la liberté de la presse posent à ces époques des questionnements que l'on retrouve dans cette tribune. La définition de ces libertés, leur périmètre, leurs limites y sont à chaque fois au cœur de débats qui contiennent leur part de violence.

Analyser comment et jusqu'où on s'oppose, réfléchir à la possibilité ou à la nécessité de limites à la liberté d'expression face à des discours radicaux ou haineux, c'est souligner que ces questions sont permanentes dans toute société qui se fonde sur des valeurs de liberté, des débuts d'une presse libre pendant la Révolution aux débats sur l'ORTF en Mai 68 en passant par les combats de l'affaire Dreyfus. C'est également montrer que la définition de la liberté évolue aussi avec les époques, les sociétés, les modes de diffusion de l'information.

Ressources ou documents pour traiter de ces questions en histoire

La réflexion en histoire peut être poursuivie dans le cadre des programmes de première.

En première générale, dans le chapitre sur « La Révolution française et l'Empire : une nouvelle conception de la nation », les débats autour de la liberté d'expression et de la presse peuvent être mobilisés.

Dans le chapitre sur la Troisième République, le travail à mener sur les oppositions à la république peut s'appuyer sur la presse pour questionner les débats autour des limites données à la liberté (le débat autour des « lois scélérates » de 1893 et 1894 peut être un support formateur).

En première technologique, le thème 2 propose un sujet d'étude sur « Victor Hugo sous la Deuxième République et le Second Empire » qui peut permettre de souligner les combats pour la liberté d'expression autour de sa lutte de proscrit puis d'exilé contre le Second Empire.

En première, le programme de la spécialité histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques permet de questionner la liberté d'expression de façon plus fine. Le thème 1 « Comprendre un régime politique : la démocratie », avec notamment le jalon « L'inquiétude de Tocqueville : de la démocratie à la tyrannie ? Une analyse politique », permet de se confronter à la réflexion d'un penseur important sur ces questions.

Le thème 4 « S'informer : un regard critique sur les sources et modes de communication » a pour objet de faire saisir le rôle des progrès techniques ainsi que le rôle fondamental d'une information libre et les enjeux qui l'entourent.

Ressources à consulter

La démocratie en spécialité HGGSP

S'informer en spécialité HGGSP

En français


L'enseignement du français au cycle 4 constitue une étape importante dans la construction d'une pensée autonome de l'élève, du développement de son esprit critique et de qualités de jugement qui lui seront nécessaires au lycée. Il contribue fortement à la formation civique et morale des élèves, tant par le développement de compétences à argumenter que par la découverte et l'examen critique des grandes questions humaines soulevées par les œuvres littéraires.

Au cycle 4, la question de la liberté d'expression peut trouver judicieusement sa place dans deux des quatre entrées qui structurent le travail en français : « Vivre en société, participer à la société » et « Agir sur le monde ».

Plus particulièrement, en classe de troisième, le questionnement associé à « Vivre en société, participer à la société » s'intitule « Dénoncer les travers de la société ». Il s'agit notamment de faire découvrir aux élèves des œuvres, des textes et des images à visée satirique, relevant de différents arts, genres et formes, et de leur faire comprendre les raisons, les visées et les modalités de la satire.

Le questionnement « individu et pouvoir » de l'entrée « Agir sur le monde / Agir dans la cité » permet de faire comprendre en quoi les textes littéraires dépassent le statut de document historique et pourquoi ils visent au-delà du témoignage et de la simple efficacité rhétorique. Ce questionnement est aussi l'occasion de s'interroger sur les notions d'engagement et de résistance, et sur le rapport à l'histoire qui caractérise les œuvres et textes étudiés.

Œuvres / la notion d'art engagé

Guernica, Picasso (1937)
Le Radeau de La Méduse, Théodore Géricault (1818-1819)
Les joueurs de Skat, Otto Dix (1920)
- Les poètes de la Résistance (« Liberté », Paul Éluard, 1942...)
- Les chansons... (Boris Vian, Le déserteur, 1954)
- Le monologue de Figaro, Le Mariage de Figaro, Beaumarchais
- Les artistes obligés d'écrire sous pseudonyme, de s'exiler...

Il s'agit aussi pour le collégien de cycle 4 de passer du recours intuitif à l'argumentation à un usage plus maîtrisé. Ainsi, étudier le genre de la lettre ouverte (« J'accuse » de Zola dans L'Aurore du 13 janvier 1898, la  préface de l'édition de 1832 du Dernier Jour d'un condamné de Victor Hugo par exemple) contribue à apprendre à connaître les principales fonctions et caractéristiques des discours argumentatifs.

Prolongements envisageables

En classe de terminale, en philosophie

La « liberté » est une des notions à étudier dans la voie générale comme dans la voie technologique.

En classe de seconde générale et technologique, en français

L'objet d'étude « La littérature d'idées et la presse du XIXe siècle au XXIe siècle » ouvre une perspective littéraire et historique sur les caractéristiques de la littérature d'idées et sur le développement des médias de masse. Il s'agit de poursuivre le travail de formation du jugement et de l'esprit critique.

En classe de seconde professionnelle, en français

L'objet d'étude « Dire et se faire entendre : la parole, le théâtre, l'éloquence » pourrait permettre une réflexion sur la liberté d'expression.

À consulter aussi

Sur le site de Canopé, le projet #Jedessine, fondé sur l'ensemble de dessins reçus par la rédaction de Charlie Hebdo.

Sur le portail « Valeurs de la République » une entrée « liberté » offre une sélection de ressources.

Sur le site du CLEMI, une fiche pédagogique pour le cycle 3 sur le dessin de presse et la liberté d'expression, une vidéo sur la liberté d'expression et ses limites