La liberté d'expression, un droit fondamental

Cette page propose des pistes de réflexion et des ressources pour travailler la question de la liberté d'expression dans les enseignements et dans des actions éducatives.

Mis à jour : octobre 2024

Pourquoi travailler la question de la liberté d'expression en classe ?

La liberté d'expression est consacrée parmi les « droits naturels et imprescriptibles de l'homme » dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (DDHC) de 1789. Son article 11 en définit l'importance, le périmètre et les enjeux : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi ». Derrière cet article se retrouvent tous les enjeux liés à la liberté d'expression : depuis ce texte fondateur, nos sociétés ont eu à arbitrer entre la nécessité que cette liberté s'exprime pour chacun et en toutes circonstances pour garantir le pluralisme sans lequel elle n'existe pas et la question des abus de cette liberté qui peuvent conduire à des dérives violentes et liberticides (haine en ligne, diffamation, etc.).

Des réponses différentes ont été apportées selon les époques et les régimes politiques, faisant évoluer la définition et le périmètre de la liberté d'expression et se traduisant à chaque fois dans la loi. Derrière ce principe se trouve également un enjeu d'éducation majeur, avec la nécessité d'apprendre aux élèves à utiliser cette liberté, en s'exprimant librement tout en étant capable d'écouter et de comprendre d'autres opinions que les leurs, mais aussi en comprenant la nécessité que des limites communes soient fixées par la loi, limites pouvant faire l'objet de débats.

Le cadre légal sur le site Vie publique

Dans quels enseignements disciplinaires ancrer cette réflexion ?

Les programmes offrent de multiples possibilités d'aborder la question de la liberté d'expression avec les élèves.

En enseignement moral et civique (EMC)

La question de la liberté d'expression est au cœur des anciens et des nouveaux programmes d'EMC du cycle 2 à la terminale.

Dans le nouveau programme entrant en vigueur progressivement à partir de la rentrée 2024, la liberté d’expression est travaillée de manière spiralaire, revenant à plusieurs reprises dans le parcours de l’élève dans une perspective de complexification progressive.

  • En CM2, elle est présentée comme l’une des libertés fondamentales des citoyens de la République française, définie par des textes juridiques ; une première approche de son application en ligne, dans une dimension éducation aux médias et à l'information (EMI), est également possible.
  • En classe de 4e, la liberté d’expression est à nouveau abordée comme l’une des déclinaisons de la liberté en tant que valeur et principe, en l’intégrant dans le cadre juridique de l’État de droit.
  • Enfin, en classe de 2de et en première année de CAP, la liberté d’expression est analysée sous l’angle de l’information, en soulignant l’articulation entre liberté et responsabilité.

Dans les anciens programmes (encore partiellement en vigueur), la liberté d’expression peut être traitée à travers les trois finalités qui structurent l’EMC.

  • Dans le cadre de la finalité « Respecter autrui », les élèves ont l'occasion de mettre en avant leurs convictions, leurs sentiments moraux ou religieux et de les confronter à celles et ceux des autres pour en saisir la pluralité. Cela permet de comprendre la nécessité que chacun soit libre de les exprimer, mais également que certaines limites sont nécessaires pour respecter les sensibilités de chacun.
  • Les libertés d'expression et de la presse sont au cœur de la finalité « Acquérir et partager les valeurs de la République ». Dans le but d'« identifier et de reconnaître les libertés fondamentales » et de connaître « les expressions littéraires et artistiques et connaissances historiques de l'aspiration à la liberté », les libertés d’expression et de la presse peuvent être étudiées comme une caractéristique fondamentale de la démocratie. Le professeur peut mettre en perspective les combats menés pour la garantir et les nouveaux défis auquel elle doit faire face. Les liens avec les programmes d'histoire, notamment celui de 4e, sont nombreux.
  • Enfin, ces libertés participent à la construction d'une culture civique, notamment par la capacité à « exprimer son opinion et respecter l'opinion des autres dans une discussion réglée ou un débat réglé ». La liberté de la presse peut aussi être au cœur de la construction d'une culture de l'engagement et de la responsabilité, d'abord pour comprendre l'engagement que nécessite l'exercice de cette liberté dans une démocratie comme la France et ailleurs dans le monde, mais aussi pour s'engager soi-même, par exemple par le biais d'un journal du collège, en cohérence avec les objectifs de l’éducation aux médias et à l’information (EMI).

En histoire

À l'école

La liberté d’expression n’apparait explicitement que dans le programme du CM2 (en soulignant sa permanence dans le droit depuis la IIIe République jusqu’à nos jours), mais les programmes d’histoire conduisent plus largement à étudier les grands textes fondateurs de la liberté d’expression en les situant dans leur contexte.

Au collège

Au collège, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 juillet 1789 est étudiée en classe de quatrième dans cadre du thème intitulé « La Révolution française et l'Empire : nouvel ordre politique et société révolutionnée en France et en Europe ».

Toujours en 4e, dans le traitement de l’histoire politique française (« Société, culture et politique dans la France du XIXe siècle ») on peut prendre la liberté d’expression comme objet d’étude. Le premier Code pénal français, rédigé en 1791, suit la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et ne reprend pas le délit de blasphème, dès lors exclu du droit. Sous la Restauration, notamment de 1824 à 1830, alors que le catholicisme est redevenu la religion de l'État, cet acquis est remis en question : la loi Serre sur la presse de 1816 crée une infraction « d’outrage à la morale publique et religieuse ». Quand bien même la « loi sur le sacrilège » de 1825 n'a jamais été appliquée et a été supprimée en 1830, il faut attendre la loi sur la liberté de la presse de 1881 pour qu'il soit bien clair qu'il n'y a pas de limites à la liberté d'expression en matière religieuse. On peut noter que cette loi reste au fondement du droit actuel.

Enfin, la Constitution de notre République est étudiée en classe de 3e dans le thème « Françaises et Français dans une République repensée ». Son ancrage historique permet de rendre compte des liens forts entre la volonté de protection des libertés et les évolutions politiques et sociales.

Ces trois moments décisifs sont indispensables pour comprendre comment notre démocratie et nos libertés se sont construites. La liberté d'expression et la liberté de la presse posent à ces époques des questionnements. La définition de ces libertés, leur périmètre, leurs limites y sont à chaque fois au cœur de débats qui contiennent leur part de violence.

En classes de CAP et au lycée

Le programme d’histoire de CAP permet de revenir sur les grands textes et les différents temps fondateurs évoqués au collège : Révolution française, IIIe République, Constitution de la Ve. La IIIe République y est notamment étudiée comme fondatrice des grandes libertés individuelles et collectives (la loi de 1881 figure parmi les repères à acquérir). En seconde professionnelle, le thème consacré à « l’Amérique et l’Europe en révolution » permet de revenir sur les grands textes proclamant les droits, dont la liberté d’expression.

En première générale et technologique, dans le traitement de la Révolution française et de l'Empire, les débats autour de la liberté d'expression et de la presse peuvent être mobilisés.

En première technologique, le thème 2 propose un sujet d'étude sur « Victor Hugo sous la Deuxième République et le Second Empire » qui peut permettre de souligner les combats pour la liberté d'expression autour de sa lutte de proscrit puis d'exilé contre le Second Empire.

Dans l’étude de la Troisième République, le travail à mener sur les oppositions à la République peut s'appuyer sur la presse pour questionner les débats autour des limites données à la liberté (le débat autour des « lois scélérates » de 1893 et 1894 peut constituer une étude de cas).

En première générale, le programme de la spécialité histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques permet de questionner la liberté d'expression de façon plus fine. Le thème 1 « Comprendre un régime politique : la démocratie », avec notamment le jalon « L'inquiétude de Tocqueville : de la démocratie à la tyrannie ? Une analyse politique », permet de se confronter à la réflexion d'un penseur important sur ces questions. Le thème 4 « S'informer : un regard critique sur les sources et modes de communication » a pour objet de faire saisir le rôle des progrès techniques ainsi que le rôle fondamental d'une information libre et les enjeux qui l'entourent : il revient notamment sur le rôle de la presse dans l’affaire Dreyfus.

Au collège comme au lycée, analyser comment et jusqu'où on s'oppose, réfléchir à la possibilité ou à la nécessité de limites à la liberté d'expression face à des discours radicaux ou haineux, permet de souligner que ces questions sont permanentes dans toute société qui se fonde sur des valeurs de liberté, des débuts d'une presse libre pendant la Révolution aux débats sur l'ORTF en Mai 68, en passant par les combats de l'affaire Dreyfus. C'est également montrer que la définition de la liberté évolue aussi avec les époques, les sociétés, les modes de diffusion de l'information.

Ressources ou documents pour traiter de ces questions en histoire

En français

L'enseignement du français au cycle 4 constitue une étape importante dans la construction d'une pensée autonome de l'élève, du développement de son esprit critique et de qualités de jugement qui lui seront nécessaires au lycée. Il contribue fortement à la formation civique et morale des élèves, tant par le développement de compétences à argumenter que par la découverte et l'examen critique des grandes questions humaines soulevées par les œuvres littéraires.

Au cycle 4, la question de la liberté d'expression peut trouver judicieusement sa place dans deux des quatre entrées qui structurent le travail en français : « Vivre en société, participer à la société » et « Agir sur le monde ».

Plus particulièrement, en classe de troisième, le questionnement associé à « Vivre en société, participer à la société » s'intitule « Dénoncer les travers de la société ». Il s'agit notamment de faire découvrir aux élèves des œuvres, des textes et des images à visée satirique, relevant de différents arts, genres et formes, et de leur faire comprendre les raisons, les visées et les modalités de la satire.

Le questionnement « individu et pouvoir » de l'entrée « Agir sur le monde / Agir dans la cité » permet de faire comprendre en quoi les textes littéraires dépassent le statut de document historique et pourquoi ils visent au-delà du témoignage et de la simple efficacité rhétorique. Ce questionnement est aussi l'occasion de s'interroger sur les notions d'engagement et de résistance, et sur le rapport à l'histoire qui caractérise les œuvres et textes étudiés.

Œuvres / la notion d'art engagé

  • Guernica, Picasso (1937)
  • Le Radeau de La Méduse, Théodore Géricault (1818-1819)
  • Les joueurs de Skat, Otto Dix (1920)
  • Les poètes de la Résistance (« Liberté », Paul Éluard, 1942...)
  • Les chansons... (Boris Vian, Le déserteur, 1954)
  • Le monologue de Figaro, Le Mariage de Figaro, Beaumarchais
  • Les artistes obligés d'écrire sous pseudonyme, de s'exiler...

Il s'agit aussi pour le collégien de cycle 4 de passer du recours intuitif à l'argumentation à un usage plus maîtrisé. Ainsi, étudier le genre de la lettre ouverte (« J'accuse » de Zola dans L'Aurore du 13 janvier 1898, la  préface de l'édition de 1832 du Dernier Jour d'un condamné de Victor Hugo par exemple) contribue à apprendre à connaître les principales fonctions et caractéristiques des discours argumentatifs.

Éclairages

Des ressources d'accompagnement des programmes peuvent apporter des éclairages sur ces points :

Prolongements envisageables

En classe de terminale, en philosophie
La « liberté » est une des notions à étudier dans la voie générale comme dans la voie technologique.

En classe de seconde générale et technologique, en français
L'objet d'étude « La littérature d'idées et la presse du XIXe siècle au XXIe siècle » ouvre une perspective littéraire et historique sur les caractéristiques de la littérature d'idées et sur le développement des médias de masse. Il s'agit de poursuivre le travail de formation du jugement et de l'esprit critique.

En classe de seconde professionnelle, en français
L'objet d'étude « Dire et se faire entendre : la parole, le théâtre, l'éloquence » pourrait permettre une réflexion sur la liberté d'expression.

Ressources à consulter

Ressources d’accompagnement des programmes

Le CLEMI

Réseau Canopé

Lumni Enseignement

Lumni

L’ARCOM

Cartooning for Peace, association agréée par le ministère en charge de l’éducation :

Des actions éducatives pour travailler la liberté d’expression

Créer un média scolaire

Produire de l’information dans un média scolaire (journal, webradio, web TV) permet d’aborder concrètement les principales questions autour de la liberté d’expression et de ses limites.

L’exercice de la publication et de la responsabilité éditoriale pour alimenter le débat public repose sur la recherche d’informations fiables, la pratique du débat et de la confrontation des opinions, la connaissance du droit de la presse et des questions déontologiques.

  • Les équipes du CLEMI, le Centre pour l’éducation aux médias et à l’information, opérateur du ministère en charge de l’éducation, organisent dans chaque académie, puis au niveau national, le concours Médiatiks ouvert à tous les médias scolaires (journaux imprimés ou en ligne, mais aussi aux radios/podcasts, vidéos/webTV, ainsi qu'aux reportages photo). Ce concours s’adresse aux écoles, aux collèges, aux lycées et aux autres établissements.
  • Le concours Kaléido’scoop est un concours national de la presse jeune organisé par l’association Jets d’encre à destination de jeunes âgés de 11 à 25 ans. Son but est d’encourager l’expression médiatique au collège et au lycée.
  • SOS Censure est le service d’assistance aux médias jeunes de l’association Jets d’encre. Porté par des bénévoles de l’association, SOS Censure permet aux journalistes jeunes rencontrant toutes formes de difficultés ou victimes de censure d’avoir un retour complet, des conseils et un soutien. Le service permet aussi de prévenir la censure, en apportant un regard extérieur sur des articles potentiellement délictueux, tout en préservant la liberté d’expression des journalistes jeunes et en luttant contre toutes formes d’auto-censure.

Ces actions peuvent être proposées dans le cadre de la Semaine de la presse et des médias dans l’École, organisée chaque année, en général au mois de mars, par le Centre pour l’éducation aux médias et à l’information (CLEMI).

Le Safer internet Day – Sensibiliser les élèves à des usages responsables sur internet (du CE au lycée)

Cette journée de sensibilisation, coordonnée par le Safer Internet France et déployée dans 150 pays, est destinée à promouvoir un Internet plus sûr pour les jeunes. Elle est un rendez-vous incontournable en matière de prévention et de sensibilisation au numérique à destination notamment des élèves et des professionnels de l’éducation.

Des ressources sont mises à disposition sur éduscol.