Enfants en danger : comment les repérer ? Que faire?
L'École est un lieu privilégié d'observation, de repérage, d'évaluation des difficultés scolaires, personnelles, sociales, familiales et de santé des élèves. Au contact quotidien des élèves et des parents, elle offre un cadre favorable au recueil de la parole de l'enfant et aux échanges avec les parents sur les questions éducatives.
Actualité
L’Éducation nationale contribue à la protection de l’enfance en danger en menant des actions de prévention et en signalant les situations des enfants en danger ou susceptibles de l’être aux autorités compétentes, à savoir à la cellule départementale de recueil de traitement et d'évaluation (CRIP) ou au parquet. Dans ce cadre, les autorités académiques concluent avec les conseils départementaux des conventions, qui peuvent être tripartites quand elles associent des parquets. Les documents qui suivent sont un exemple de bonnes pratiques, qui s’appuient sur l’expérience du département de la Somme, dont certaines sont employables dans d’autres départements et qui, en tout état de cause doivent être contextualisées et associer toutes les parties prenantes
- Livret d'accompagnement et prise en charge des situations de protection de l’enfance au sein de l’Éducation nationale
- Convention entre la direction des services départementaux de l’éducation nationale, le conseil départemental et le parquet sur la prise en charge coordonnée des violences et maltraitances révélées en milieu scolaire
- Modèle de document destiné à un signalement ou à une information préoccupante
Ces documents relèvent de la mesure 3 du Grenelle des violences conjugales dont c’est le deuxième anniversaire cette année.
Cette page explique comment identifier une situation de danger ou risque de danger : recueillir la parole de l’enfant, mobiliser les personnels ressources dans l’évaluation de la situation et transmettre, si nécessaire et en fonction de la gravité, une information préoccupante au conseil départemental ou un signalement au procureur de la République.
Repérer les enfants et adolescents en danger
Qu'est-ce qu'un enfant en danger ?
L'article L 221-1 du Code de l'action sociale et des familles (en référence à l'article 375 du Code civil) précise :
- qu'un enfant mineur est en danger quand sa santé, sa sécurité, sa moralité, ou quand les conditions de son éducation, de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises ;
- qu'il est en risque de danger quand les difficultés rencontrées peuvent mettre en danger sa santé, sa sécurité, sa moralité, ou son éducation, son développement physique, affectif, intellectuel et social ;
- que pour les jeunes majeurs (de moins de 21 ans), le danger concerne les difficultés familiales, sociales, éducatives susceptibles de compromettre gravement leur équilibre.
Chaque élève, qu’importe son milieu social d’origine, peut être en danger ou en risque de danger dans son environnement familial, social ou en institution.
Comment repérer un élève en danger ou risque de danger
L’ensemble des personnels de l’Éducation nationale, et notamment les enseignants, est à même de repérer des élèves en danger ou en risque de danger.
Recevoir des confidences de l'élève ou de ses proches
Prendre en compte la parole de l’élève | Inviter l’élève à s’exprimer sans jamais lui assurer de conserver secrètes ses confidences mais en l’assurant de votre aide et votre soutien, L’écouter, le laisser parler librement sans émettre de doute, interpréter ou tenter de vérifier la véracité de ses propos. Ne pas demander à l’élève de se répéter en particulier auprès d’interlocuteurs différents, noter mot pour mot les propos tenus par l’élève. Ces notes seront à retranscrire dans l’information préoccupante ou le signalement, le cas échéant. |
Évaluer la situation de danger | Évaluer le risque de danger auquel est exposé l’élève et la nécessité de le protéger immédiatement. L’identité des auteurs présumés est dans ce cadre un élément essentiel. |
Informer l’élève des suites | Expliquer à l’élève les démarches que vous ferez à la suite du recueil de ses confidences : information à votre autorité hiérarchique, transmission d’un écrit aux autorités compétentes (cellule de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes ou procureur de la république) et, sauf si cela est contraire à l’intérêt de l’élève, information et échange avec les détenteurs de l’autorité parentale. |
Les personnels sociaux et de santé sont des personnes ressources sur lesquelles vous pouvez vous appuyer lors de l’ensemble de ces étapes.
Être alerté par des signes de souffrance ou de mal-être de l’élève, qui sont différents selon l'âge
Symptômes physiques | Traces de coups, blessures, scarifications, accidents fréquents, problèmes de santé répétés, retard staturo-pondéral, arrêt du développement psychomoteur ou intellectuel, manque d'hygiène, etc. |
Troubles du comportement | Changement récent et massif du comportement, violence, agressivité, mutisme, repli sur soi, avidité affective, comportement érotisé, fugues, attitudes craintives ou peureuses, prises de risques, conduites addictives, désinvestissement scolaire brutal, absentéisme répété, chute brutale des résultats, refus de rentrer au domicile, etc. |
Manifestations psychosomatiques | Troubles du sommeil, troubles du comportement alimentaire, énurésie, encoprésie, maux de ventre, malaises, etc. |
Un signe de souffrance ou de mal-être constitue un signal à prendre en compte dans un contexte plus global, incluant un facteur temps. Isolé, il ne constitue pas un élément déterminant. C’est souvent un faisceau d’indices, une accumulation d’éléments qui caractérisent une situation de danger ou risque de danger.
Attention : ces signes peuvent toutefois avoir une autre signification. Il convient donc de prendre le temps d'analyser l'origine de ces manifestations, avec l'élève et sa famille. Les personnels sociaux et de santé peuvent apporter leur appui et leur conseil dans cette analyse et la gestion des situations.
Être alerté par le comportement des adultes de l'entourage de l'élève (famille, institution)
Attitude éducative non adaptée | Mode ou rythme de vie, absences ou excès de limites, exigences éducatives inadaptées, sanctions disproportionnées, etc. |
Comportement à l’égard de l’enfant ou adolescent | Absence de soins, manque d'attention, violences verbales physiques, psychologiques, sexuelles, etc. |
Situation de l’adulte | Situation de grandes difficultés (fragilité psychologique, addictions, pathologie, violences conjugales, etc.). |
- Lors de confidences, il est important de prendre la parole de l’élève en considération, sans la mettre en doute ; l’élève doit se sentir écouté, sans être jugé.
- Lors de l’observation de signes, il est important de dire à l’élève que l’on a remarqué ces signes et de l’inviter à parler en lui assurant son soutien.
- Lors de situations préoccupantes, un échange doit être proposé aux détenteurs de l’autorité parentale afin de recueillir et partager leur point de vue sur la situation, sauf si cela est contraire à l’intérêt de l’enfant.
Comment évaluer une situation de danger ou de risque de danger ?
Pourquoi est-il nécessaire d’échanger entre professionnels ?
Face à ces situations, la règle est de ne jamais rester seul et, dans le respect de la confidentialité, d'échanger avec d'autres professionnels au sein de l'institution, afin :
- d’aider l'élève de la façon la plus appropriée ;
- de permettre aux services compétents d'évaluer et traiter la situation dans les meilleurs délais ;
- de ne pas rester isolé avec un doute.
Chaque professionnel a, dans le cadre de ses missions, compétence pour analyser la situation, confronter les points de vue quant au danger éventuellement repéré et décider de l'orientation à prendre.
Quels sont les professionnels ressources de l’Éducation nationale dans les situations de danger ou risque de danger ?
Au-delà des échanges nécessaires avec la hiérarchie (par exemple, l’inspecteur de l’Éducation nationale ou le chef d’établissement), l'assistant de service social, l'infirmier, le médecin, le psychologue de l’Éducation nationale, le directeur de l'école constituent des personnes-ressources dans l’analyse des situations.
Concernant le premier degré
Le conseiller technique de service social départemental (CTSS-D) qui, sous l’autorité du directeur académique des services de l’Éducation nationale (DASEN), assure l’encadrement technique du service social départemental, apporte en matière de protection de l’enfance le conseil à l’institution, notamment pour les situations des élèves relevant du premier degré. Selon les organisations de service, l’expertise et l’accompagnement apportés dans les situations d’élèves en danger ou en risque de l’être pourront, pour le premier degré, être assurés soit par un CTSS-D adjoint ou coordonnateur, soit par un assistant de service social notamment lorsqu’il intervient au sein des écoles rattachées aux collèges situés en réseau d’éducation prioritaire.
Concernant le second degré
Les personnels sociaux et de santé de l’Éducation nationale sont les interlocuteurs de référence au sein des établissements scolaires. Ils apportent leur expertise et leur conseil aux membres de l’équipe éducative dans le repérage, l’accueil de la parole, l’orientation des élèves victimes et l’évaluation des situations.
En complément des ressources internes
Le « 119 allô enfance en danger » (service national d’accueil téléphonique de l’enfance en danger) est un numéro d’urgence qui permet de recueillir, dans un respect de confidentialité, les appels 24h/24 relatifs à une situation d’enfant en danger ou en risque de l’être.
Quelles sont les procédures permettant d’alerter sur la situation d’un élève en danger ou risque de danger ?
La réglementation
L'article L. 226-2-1 du Code de l'action sociale et des familles dispose que « [...] les personnes qui mettent en œuvre la politique de protection de l'enfance [...] ainsi que celles qui lui apportent leur concours transmettent sans délai au président du conseil général [...] toute information préoccupante sur un mineur en danger ou risquant de l'être [...].»
L’article 40 du code de procédure pénale dispose que « Le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner conformément aux dispositions de l’article 40-1. Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »
L’article 226-4 du code de l’action sociale et des familles dispose que « Le président du conseil départemental avise sans délai le procureur de la République aux fins de saisine du juge des enfants lorsqu'un mineur est en danger au sens de l'article 375 du Code civil [...] toute personne travaillant au sein des organismes mentionnés à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 226-3 qui avise directement, du fait de la gravité de la situation, le procureur de la République de la situation d'un mineur en danger adresse une copie de cette transmission au président du conseil départemental [...] ».
Les modalités de transmission des informations préoccupantes
Qu'est-ce qu'une information préoccupante ?
L’article R226-2-2 du code de l’action sociale et des familles dispose que« L’information préoccupante est une information transmise à la cellule départementale mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 226-3 pour alerter le président du conseil général sur la situation d’un mineur, bénéficiant ou non d’un accompagnement, pouvant laisser craindre que sa santé, sa sécurité ou sa moralité sont en danger ou en risque de l’être ou que les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises ou en risque de l’être. La finalité de cette transmission est d’évaluer la situation d’un mineur et de déterminer les actions de protection et d’aide dont ce mineur et sa famille peuvent bénéficier. »
Cette information est étayée par une réflexion partagée qui prend en compte :
- les éléments d'information relatifs à l'environnement de l'enfant ;
- les éléments relatifs aux ressources et capacités des parents déjà disponibles au sein de l'institution ;
- l'identification du besoin de procéder à une évaluation pluridisciplinaire ou de réévaluer la situation, d'approfondir une aide apportée ou d'assurer une protection immédiate.
À qui transmettre une information préoccupante ?
Les informations préoccupantes sur un mineur en danger ou risquant de l'être sont transmises sans délai au président du conseil départemental ou au responsable désigné par lui.
Tout personnel ayant un doute ou une présomption de maltraitance, de situation de danger ou de risque de danger concernant un élève, après réflexion partagée au sein de l'institution, doit transmettre par écrit les éléments de la situation au président du conseil départemental en adressant « une information préoccupante » à la cellule départementale de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes.
Cette cellule, créée dans chaque département, est placée sous la responsabilité du président du Conseil départemental qui agit avec le concours de l'État et de l'autorité judiciaire ainsi que de ses partenaires.
Des protocoles départementaux signés entre ces partenaires prévoient les procédures et modalités de saisine. Ils sont souvent accompagnés de guides à destination des professionnels.
Selon les modalités prévues par le protocole signé entre le président du conseil départemental et ses partenaires, dont le DASEN, ces informations sont adressées :
- soit directement à la cellule, avec copie du document ou du bordereau pour information au DASEN ou à ses conseillers techniques sociaux ou de santé, dans le respect des règles de déontologie,
- soit à la cellule par l'intermédiaire du DASEN ou de ses conseillers techniques sociaux ou de santé, dans le respect des mêmes règles de déontologie.
Une évaluation de la situation sera réalisée par les services départementaux en lien avec les partenaires concourant à la protection de l'enfance et une mesure de protection sera mise en œuvre le cas échéant.
Comment signaler un danger grave ou imminent pour un élève ?
- Dans les cas où la gravité de la situation le justifie, par exception à l'obligation de transmission à la cellule départementale, tout personnel de l'Éducation nationale peut aviser directement le procureur de la République en tant que personne travaillant dans un service public susceptible de connaître des situations de danger (article L 226-4 du code l'action sociale et des familles).
- Par ailleurs si, en qualité de « fonctionnaire, dans l'exercice de ses fonctions, il acquiert la connaissance d'un crime ou de délit », il est tenu d'en aviser sans délai le procureur de la République (article 40 du code de procédure pénale).
Une copie de cette transmission est alors adressée à la cellule départementale. Cette copie ou un bordereau de l'envoi est adressé par ailleurs au DASEN ou à ses conseillers techniques sociaux ou de santé, dans le respect des règles de déontologie.
Circuit de transmission d'une situation d'enfant en danger ou en risque de danger
Schéma actualisé en février 2022.
Que faire si vous n’avez pas de retour sur l’information préoccupante ou le signalement réalisé ?
En cas d’information préoccupante (IP), les services sociaux du conseil départemental ont l’obligation de transmettre un accusé de réception lorsqu’elle est réalisée par un professionnel. Si cet accusé de réception est obligatoire, le conseil départemental n’a pas d’obligation d’information sur les mesures prises suite à cette IP. Selon les territoires, ce courrier d’accusé de réception est transmis par la cellule de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes du conseil départemental à l’école, à l’établissement ou au service social en faveur des élèves (SSFE).
Les services départementaux ont trois mois pour évaluer la situation de risque ou de danger. Les travailleurs sociaux mandatés peuvent entrer en contact avec l’école ou l’établissement scolaire après en avoir informé la famille, sauf si c’est contraire à l’intérêt de l’enfant (article L. 226-2-2 du Code l’action sociale et des familles).
Les parquets n’ont pas l’obligation de transmettre les décisions prises aux personnes qui ont fait le signalement, même dans le cas d’une ordonnance de placement provisoire (OPP).
Le service social en faveur des élèves (SSFE) peut servir d’intermédiaire pour contacter les différents services qui œuvrent pour la protection de l’enfance et connaître les décisions prises. Il pourra également conseiller les équipes en école ou en établissement sur la continuité de l’accueil et la prise en charge de l’élève concerné par l’IP ou le signalement.
Associer la famille à toutes les étapes
Les parents ou les titulaires de l'autorité parentale sont associés à la réflexion dans le cadre d'un dialogue, autour des besoins et de l'intérêt de leur enfant, ainsi que sur les ressources qu'ils peuvent mobiliser. Ils sont avisés de la transmission des informations préoccupantes à la cellule départementale ou du signalement au procureur, sauf si le fait de les informer est contraire à l'intérêt de l'enfant comme cela peut être le cas dans les situations de violences intrafamiliales.
À noter : prévenir les violences sexuelles intrafamiliales
Protéger les enfants contre toute forme de violence, dont les violences sexuelles, est un impératif qui s'impose à tous. Les violences sexuelles intrafamiliales à l’encontre des enfants et des adolescents ne peuvent admettre aucune tolérance. Elles nécessitent une vigilance accrue des adultes pour favoriser leur détection et améliorer la prise en charge des victimes.
À consulter
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