publié le 04 jan 2022 par Hélène HORSIN MOLINARO [5]
Les ressources végétales renouvelables, ou encore la biomasse, utilisées dans la conception de matériaux est une ligne de la transition vers des matériaux durables. Cependant ces nouveaux éco-matériaux suscitent souvent la méfiance sur leur résistance et leur durée dans le temps comparés aux matériaux issus de petro-ressources. Étudier le vieillissement de ces éco-matériaux posent des problèmes d'échelle de temps, en effet recourir à l'accélération artificielle des processus dans les laboratoires peut risquer de s'écarter de la réalité. Le lin est une plante cultivée et utilisée en matériaux depuis des millénaires pour des vêtements, du papier ou encore des toiles pour les peintures.
Une équipe de l'INRAE, de l'université Bretagne-Sud, du CNRS, de l'université de Montpellier, du synchrotron SOLEIL, de l'université de Camerino (Italie) et du laboratoire de résonance magnétique Capitani-Segre de CNR (Italie) a étudié les fibres de lin issues des toiles de quatre tableaux italiens du XVIIe et XVIIIe siècles dont les modalités de conservation pouvaient être tracées. L'un des défis de cette étude était la préservation des œuvres, les prélèvements ont été effectués au dos des toiles dans des zones invisibles. Plusieurs méthodes d'analyse optique à très haute résolution ont ensuite été utilisées afin d'étudier la structure des fibres des échantillons sans les dégrader : microscopie à force atomique pour topographier la surface des échantillons et cartographier la rigidité des fibres à l'échelle nanométrique, microscopie biphotonique, spectroscopie RMN et spectroscopie à infrarouge pour analyser l'organisation, l'évolution de la biochimie et de la structure des fibres de lin.
Les résultats de cette étude ont été publiés le 7 novembre 2021 dans Journal of Cultural Heritage, complétant des travaux parus en septembre dans Nature Plants sur l'analyse de linge mortuaire égyptien daté de 4000 ans, de la même équipe française en collaboration avec de musée du Louvre, de FEMTO-ST, du LMGC et de l'université de Cambridge. Les résultats montrent que les fibres issues des toiles âgées de quelques siècles ont subi des marques de dégradations plus importantes que celles âgées de millénaires ! Les fibres des toiles ont été en tension constante et également exposées aux variations d'humidité et de température, à la pollution de l'air lors de leurs différentes expositions. D'autres agents de vieillissement interviennent comme la colle, le plâtre, les peintures ce qui leur confère, comme les matériaux modernes, un état de matériaux composites : plusieurs matériaux souvent de natures différentes coexistent combinant les propriétés des matériaux d'origine. En définitif, les tableaux ayant vécu le plus de variations environnementales ou ayant subi des traitements le long de leur conservation sont les plus dégradés. Ces études apportent de précieuses information sur le comportement et l'évolution des performances des fibres naturelles qui composeront des futurs éco-matériaux robustes et durables.
► Voir le communiqué de presse sur le site du CNRS [6]
Liens:
[1] https://eduscol.education.fr/sti/system/files/images/actualites/14180/14180-toile-de-lin.jpg
[2] https://eduscol.education.fr/sti/system/files/images/actualites/14180/14180-peinture-sur-toile-de-lin.jpg
[3] https://eduscol.education.fr/sti/system/files/images/actualites/14180/14180-dos-de-toile.jpg
[4] https://eduscol.education.fr/sti/system/files/images/actualites/14180/14180-cnrs.png
[5] https://eduscol.education.fr/sti/utilisateurs/helene-horsin-molinaro?node=14180
[6] https://www.cnrs.fr/sites/default/files/press_info/2021-11/CP_Fibres-pass%C3%A9-ecomateriaux-futur.VF_.pdf