Trèves, la basilique de Constantin

La basilique antique : structure et fonction

À la période hellénistique (IVe siècle avant J.-C.) dans le monde grec, la “basilique” (de l’adjectif grec basilikos, royal) est un type de grand bâtiment rectangulaire qui borde l’agora (la place publique).
Ces édifices en forme de galerie couverte (pour protéger des intempéries) sont multifonctionnels (justice, administration, commerce, prestige) et ouverts au public.
Le modèle est repris dans le monde romain : au Ier siècle, à Rome, la Basilique Julienne (Basilica Iulia) est le plus grand bâtiment du Forum avec ses cinq nefs (une nef centrale et deux fois deux nefs latérales, sur cent mètres) au sol recouvert d'un pavement de marbre précieux et de marbre blanc.
Les basiliques antiques abritaient les travaux des magistrats, en particulier lorsqu’ils rendaient la justice.

La basilique de Constantin

La basilique, également nommée Aula Palatina ("Cour du Palais"), est la reconstitution de la plus vaste salle de l’Antiquité que l’on puisse voir dans son intégralité. C’était à l’origine la salle principale de la résidence impériale bâtie sous Constantin aux environs de 310 après J.-C. Désormais classé au Patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO, l’imposant bâtiment fut plusieurs fois remanié, puis reconstruit après avoir brûlé entièrement en 1944. Consacré au culte protestant depuis 1856, il fait depuis fonction de temple (le premier et le plus ancien dans le fief catholique de Trèves).

Trèves, la basilique de Constantin

Trèves, la basilique de Constantin, © Odysseum, photo A. Collognat

On sait que Constantin résida à Trèves de 306 à 312 : la cité était alors l’une des quatre capitales de la Tétrarchie.
Il profita de son séjour pour initier un imposant programme d’embellissement de la ville, promue au rang de résidence impériale.

Construite avec les pierres d’édifices plus anciens, la basilique ne constituait pas un bâtiment isolé : elle était comprise dans l’enceinte du palais impérial ; les vestiges des bâtiments adjacents ont été mis au jour dans les années 1980 et sont aujourd'hui visibles.
Son aspect actuel ne restitue pas complètement l’architecture d’origine car, à l’époque, les briques étaient couvertes d’un crépi. Quelques traces de ce crépi ainsi que certains éléments antiques ont été conservés à hauteur des baies.

Trèves, basilique (intérieur et extérieur)

La basilique de Constantin à Trèves (extérieur et intérieur), © Odysseum, photos A. Collognat

L'espace intérieur de la basilique de Trèves est long de 67 mètres (75 mètres si on ajoute le porche d’entrée), large de 27, 2 mètres (225 par 92 pieds romains) et haut de 33 mètres : il servit sans doute de salle du trône à Constantin qui devait y tenir ses audiences impériales.
On peut constater que la profondeur de la pièce a été soulignée par des subtilités optiques : les fenêtres de l’abside ainsi que les niches situées dessous sont plus étroites au milieu, la distorsion renforçant ainsi l’effet de perspective. Cette pièce était ornée de marbre, de mosaïques et de statues ainsi que d’un plafond à caissons. Le chauffage était assuré par un système d’hypocauste constitué d’un double plancher alimenté par cinq chaudières, avec des conduits de chaleur évacuant l’air chaud dans l’épaisseur des murs.

Trèves BAsilique intérieurTrèves, Basilique de Constantin intérieur

Intérieur de la basilique de Constantin à Trèves, © Odysseum, photos A. Collognat


Tout ce dispositif somptueux fut détruit au Ve siècle par les Francs : ils construisirent même un lotissement dans la ruine privée de son toit. Plus tard les murs furent reconvertis en château-fort.
Puis le complexe servit de résidence princière et de centre administratif à l’archevêque de Trèves.

L’abside fut transformée en maison-tour, flanquée de tourelles à la jonction avec la façade, et les murs découpés de créneaux : cet aspect prévalut jusqu’aux alentours de l’année 1600.
L’archevêque Lothaire de Metternich fit édifier sa résidence princière de Grand-Électeur tout contre la basilique au début du XVIIe siècle. Pour cela, on abattit les murs Est et Sud de l’édifice ; le reste fut intégré directement au nouveau palais comportant trois ailes.

En 1761, l’aile Sud fut transformée en un véritable palais rococo par l’architecte de la Cour Johannes Seitz, conseillé par le célèbre Balhasar Neumann qui a conçu l’imposante cage d’escalier. Le bâtiment est aujourd’hui le siège des services administratifs du Land).
À l’initiative du roi de Prusse Frédéric-Guillaume IV (1840-1861), la basilique fut rendue à son architecture romaine d’origine, selon une reconstitution du colonel Carl Schnitzler (1846-1856). À la fin du XIXe siècle, le sculpteur Gustav Kaupert de Francfort réalisa cinq statues pour la basilique : elles représentaient Jésus-Christ et les Évangélistes ; il n’en reste aujourd’hui que les têtes.
Après la guerre et l’incendie de 1944, la reconstruction a été menée avec beaucoup de prudence : seules les briques de parement apparentes ont été utilisées pour les murs intérieurs, reconstitués avec le souci historique du XIXe siècle.

Besoin d'aide ?
sur