Pénélope et Ulysse

Dans ses Héroïdes, le poète latin Ovide imagine que Pénélope écrit à Ulysse pour lui dire son amour et son impatience de le revoir.

Haec tua Penelope lento tibi mittit, Ulixe
nil mihi rescribas attinet : ipse veni !
Troia jacet certe, Danais invisa puellis ;
vix Priamus tanti totaque Troia fuit.
O utinam tum, cum Lacedaemona classe petebat,
obrutus insanis esset adulter aquis !
non ego deserto jacuissem frigida lecto,
nec quererer tardos ire relicta dies ;
nec mihi quaerenti spatiosam fallere noctem
lassaret viduas pendula tela manus.
Quando ego non timui graviora pericula veris ?
res est solliciti plena timoris amor.
In te fingebam violentos Troas ituros ;
nomine in Hectoreo pallida semper eram.

" Ta Pénélope t'envoie cette lettre, Ulysse qui tarde trop : ne me réponds rien, mais viens toi-même. Elle est certainement tombée, cette Troie odieuse aux filles de la Grèce. Priam et Troie tout entière valent à peine tout ce qu'ils me coûtent. Oh ! que n'a-t-il été enseveli dans les flots furieux, Pâris, le ravisseur adultère, alors que sa flotte l'emportait vers Sparte ! Je n'aurais pas, sur un lit froid et solitaire, pleuré l'absence d'un époux ; je n'accuserais pas, loin de lui, la lenteur des jours ; et, dans ses efforts pour remplir le vide des nuits, ta veuve ne verrait pas une toile toujours inachevée entre ses mains fatiguées. Quand m'est-il arrivé de ne pas craindre des dangers plus grands que la réalité ? L'amour s'inquiète et craint sans cesse. Je me figurais les Troyens tombant sur toi avec violence ; le nom d'Hector me faisait toujours pâlir d'effroi. "

Ovide, Héroïdes, I, v. 1-14.

Un article à voir sur Odysseum :

Pénélope en littérature et dans les arts d'Homère à la Renaissance.

Fille d’Icarios, frère du roi de Sparte Tyndare, Pénélope est la fidèle épouse d’Ulysse, roi d’Ithaque, le héros de l’Odyssée. Elle est aussi la cousine d’Hélène, fille de Tyndare.

Ulysse fait d'abord partie des prétendants de la divine Hélène, comme toute la jeunesse dorée de Grèce. Mais il se rend vite compte qu’il n’a pas les moyens de rivaliser avec les puissants princes de Sparte ou de Mycènes. Tyndare apprécie néanmoins l’intelligence politique et les performances sportives d’Ulysse : il le présente à son frère. Celui-ci n’est pas trop disposé à laisser partir sa fille Pénélope, mais celle-ci choisit de quitter la maison paternelle avec Ulysse, qui a demandé sa main.
Leur bonheur est de courte durée : peu après la naissance de leur fils Télémaque, Ulysse doit partir à la guerre que mènent les Grecs contre Troie. Vingt ans après, tous les autres chefs grecs sont soit morts au champ d’honneur soit rentrés, alors que Pénélope est toujours sans nouvelles de son mari.

Il n’est pas d’usage à cette époque de laisser une femme gérer seule les biens de la famille, surtout si elle est à la tête d’un royaume. Une veuve doit se remarier rapidement pour être prise en charge par son nouveau mari. C’est pourquoi les prétendants affluent et ils ont droit à l’hospitalité jusqu’à ce que Pénélope ait fait son choix. Il faut nourrir et loger selon les règles tous ces hommes de haut rang, ce qui coûte cher. Même Télémaque, devenu adulte, a hâte de disposer enfin de son patrimoine. Mais Pénélope tient bon car elle tire des songes inspirés par Athéna l’intime conviction qu’Ulysse n’est pas mort.
Elle trouve toutes sortes d’excuses. Ainsi, elle ne veut pas se remarier avant d’avoir tissé le linceul de son noble beau-père, Laërte, et elle n’en finit pas de tisser, défaisant la nuit l’ouvrage de la journée. Après trois ans d’atermoiements, son stratagème est dévoilé par une servante. Heureusement, c’est le moment que choisit Ulysse pour réapparaître, déguisé en mendiant.
Pénélope est la dernière à accepter de le reconnaître, malgré les prodiges d’Athéna pour lui rendre sa prestance, et malgré le massacre des prétendants. C’est seulement quand Ulysse lui rappelle le secret de fabrication du lit conjugal qu’elle s’abandonne à la joie des retrouvailles. Athéna retient alors la nuit pour eux.

Pénélope a beaucoup de points communs avec son époux : rusée, prudente jusqu’à la méfiance, usant de la parole et du charme pour arriver à ses fins, elle est aussi loyale et d’une détermination sans faille. Elle n’est le modèle de vertu, resté célèbre, que chez Homère. Certaines traditions rapportent qu’elle aurait cédé à Antinoos, le plus fort des prétendants, ou même à plusieurs d’entre eux, et qu’Ulysse l’aurait répudiée à son retour. Pour d’autres, Pénélope épouse Télégonos, le fils d’Ulysse et de Circé, après qu’il a tué son père par accident, et elle a un fils avec lui, Italos, qui, selon certains mythographes, donne son nom à l’Italie.

 

Ce que chante Homère :

θεοὶ δ᾽ ὤπαζον ὀϊζύν,
οἳ νῶϊν ἀγάσαντο παρ᾽ ἀλλήλοισι μένοντε
ἥβης ταρπῆναι καὶ γήραος οὐδὸν ἱκέσθαι.

« Ah ! les dieux nous ont marqués pour le malheur, eux qui nous envièrent la joie de rester l'un près de l'autre, de goûter ensemble la douceur de nos jeunes années pour parvenir ensemble au seuil de la vieillesse. »

Homère, Odyssée, chant XXIII, vers 210-212

Dans ses Héroïdes, le poète latin Ovide imagine que Pénélope écrit à Ulysse pour lui dire son amour et son impatience de le revoir.

Haec tua Penelope lento tibi mittit, Ulixe
nil mihi rescribas attinet : ipse veni !
Troia jacet certe, Danais invisa puellis ;
vix Priamus tanti totaque Troia fuit.
O utinam tum, cum Lacedaemona classe petebat,
obrutus insanis esset adulter aquis !
non ego deserto jacuissem frigida lecto,
nec quererer tardos ire relicta dies ;
nec mihi quaerenti spatiosam fallere noctem
lassaret viduas pendula tela manus.
Quando ego non timui graviora pericula veris ?
res est solliciti plena timoris amor.
In te fingebam violentos Troas ituros ;
nomine in Hectoreo pallida semper eram.

" Ta Pénélope t'envoie cette lettre, Ulysse qui tarde trop : ne me réponds rien, mais viens toi-même. Elle est certainement tombée, cette Troie odieuse aux filles de la Grèce. Priam et Troie tout entière valent à peine tout ce qu'ils me coûtent. Oh ! que n'a-t-il été enseveli dans les flots furieux, Pâris, le ravisseur adultère, alors que sa flotte l'emportait vers Sparte ! Je n'aurais pas, sur un lit froid et solitaire, pleuré l'absence d'un époux ; je n'accuserais pas, loin de lui, la lenteur des jours ; et, dans ses efforts pour remplir le vide des nuits, ta veuve ne verrait pas une toile toujours inachevée entre ses mains fatiguées. Quand m'est-il arrivé de ne pas craindre des dangers plus grands que la réalité ? L'amour s'inquiète et craint sans cesse. Je me figurais les Troyens tombant sur toi avec violence ; le nom d'Hector me faisait toujours pâlir d'effroi. "

Ovide, Héroïdes, I, v. 1-14.

Un article à voir sur Odysseum :

Pénélope en littérature et dans les arts d'Homère à la Renaissance.

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