La Grèce contre la Perse : Une unification des cités grecques sous domination macédonienne

NOTES

  1. Voir Lycurgue, Contre Léocrate, 53.
  2. Voir Démosthène, Sur la Couronne, 248.
  3. Voir Diodore, XVI, 94, 4.
  4. Olympias, à l’avènement d’Alexandre, fait égorger Cléopâtre et son enfant qui venait de naître. Attale est assassiné.
  5. Voir aussi Plutarque, Alexandre, 9 et 10, 8 ; Athénée, 13, 557 e ; Pausanias, 8, 7, 7.
  6. Voir Eschine, Contre Ctésiphon, 173.
  7. L’acropole de Thèbes

La ligue de Corinthe et la proclamation de l’union des cités grecques contre les Perses

 

338. La Ligue de Corinthe. Proclamation de la guerre panhellénique contre les Perses.

Serment de ceux qui participent à la Ligue de Corinthe. Stèle de marbre brisé, trouvée sur l’Acropole d’Athènes, écriture en files.

« Serment. Je jure par Zeus, Gè, Hélios, Poséidon, Athéna, Arès, tous les dieux et déesses, je resterai dans la paix et ne détruirai pas les traités conclus avec Philippe de Macédoine, je ne por­terai pas armes pour nuire à quiconque de ceux qui restent fidèles aux serments, ni sur terre ni sur mer, je ne m’emparerai d’aucune ville, ni d’aucun fort, ni d’aucun port appartenant à ceux qui parta­gent la paix, en leur faisant la guerre, ni par art ni par ruse, et je ne détruirai pas la royauté de Philippe et de ses descendants, ni les constitutions en usage chez l’un ou l’autre d’entre eux, au moment où ils ont prêté les serments de la paix. Je ne ferai rien de contraire aux traités et ne per­mettrai à personne de le faire, autant qu’il sera de mon pouvoir ; si quelqu’un fait quelque chose de contraire aux serments et aux traités, j’apporterai toute que demanderont les victimes, je combat­trai qui transgressera la paix commune, selon les décisions du conseil commun et les ordres de son chef et je n’obli­gerai pas […] 5, Corcyréens 2, Thessaliens, 10, Magnètes de Thessalie 2, Achéens de Phtiotide 2, Insulaires 1, Samothrace et Thasos 2, Étoliens 3, Acarnaniens 2, Ambraciotes 1, […] de Thrace et […] de Phocide 3, Locriens 3, Doriens, Otéens, Maliens, Anianes, Agriens, Dolopes 5, Athamanes, et Perrhèbes 2, Zacynthe et Céphallénie 3. »

Inscription historique grecque.

La nouvelle du désastre de Chéronée provoque une panique à Athènes. Une loi interdit à tout ci­toyen de quitter la cité. Les contrevenants pouvaient être accusés de trahison1. Mais, si Démosthène quitta Athènes, c’était en réalité pour une mission officielle2.

[159] Ἵνα δ’ εἴπω καὶ περὶ τοῦ τετάρτου καιροῦ καὶ τῶν νυνὶ καθεστηκότων πραγμάτων, ἐκεῖνο ὑμᾶς ὑπομνῆσαι βούλομαι, ὅτι Δημοσθένης οὐ τὴν ἀπὸ στρατοπέδου μόνον τάξιν ἔλιπεν, ἀλλὰ καὶ τὴν ἐκ τῆς πόλεως. Τριήρη προσλαβὼν ὑμῶν, καὶ τοὺς Ἕλληνας ἀργυρολογήσας. Καταγαγούσης δ’ αὐτὸν εἰς τὴν πόλιν τῆς ἀπροσδοκήτου σωτηρίας, τοὺς μὲν πρώτους χρόνους ὑπότρομος ἦν ἅνθρωπος, καὶ παριὼν ἡμιθνὴς ἐπὶ τὸ βῆμα, εἰρηνοφύλακα ὑμᾶς αὑτὸν ἐκέλευε χειροτονεῖν· ὑμεῖς δὲ, κατὰ μὲν τοὺς πρώτους χρόνους, οὐδ’ ἐπὶ τὰ ψηφίσματα εἰᾶτε τὸ Δημοσθένους ἐπιγράφειν ὄνομα, ἀλλὰ Ναυσικλεῖ τοῦτο προσετάττετε· νυνὶ δ’ ἤδη καὶ στεφανοῦσθαι ἀξιοῖ.

[159] Mais, afin de parler des circonstances présentes qui forment le quatrième temps de l’administration de Démosthène, je dois vous rappeler que, non content d’avoir quitté son poste comme guerrier, il le quitta encore comme citoyen. Au lieu de revenir à Athènes, il s’embarque sur un de vos vaisseaux, et va rançonner les Grecs. Un bonheur inespéré l’ayant ramené dans la ville, tremblant d’abord et presque mourant, il monte à la tribune et vous demande de le nommer pour maintenir la paix. Vous ne vouliez pas même alors que le nom de Démosthène parût à la tête de vos décrets, vous prîtes celui de Nausiclès ; et il veut à présent qu’on le couronne !

Eschine,Contre Ctésiphon, 159, trad. abbé Auger.

L’assassinat de Philippe de Macédoine et le nœud politique macédonien

 

336. Parménion et Attale en Asie. Assassinat de Philippe sans doute organisé par Olympias, la mère d’Alexandre3. Elle venait d’être outragée – et non répudiée – par le mariage de Philippe avec Cléopâtre4, la nièce d’Attale, une macédo­nienne à la différence d’Olympias, une Épirote. Le mariage de Philippe et de Cléopâtre est un enjeu politique de première importance5. Alexandre est me­nacé dans ses droits à la suc­ces­sion.

[3] […] ἔχων δὲ τῆς βασιλείας ἔφεδρον Ἄτταλον τὸν ἀδελφὸν Κλεοπάτρας τῆς ἐπιγαμηθείσης ὑπὸ Φιλίππου τοῦτον ἔκρινεν ἐκ τοῦ ζῆν μεταστῆσαι : καὶ γὰρ ἐτύγχανε παιδίον ἐκ τῆς Κλεοπάτρας γεγονὸς τῷ Φιλίππῳ τῆς τελευτῆς τοῦ βασιλέως ὀλίγαις πρότερον ἡμέραις.

[3] […] Il avait cependant pour secret compétiteur au trône Attale, frère de Cléopâtre, seconde femme de Philippe et il pensait dès lors à se défaire de lui : d’autant plus que Philippe, peu de jours avant sa mort funeste, avait eu un fils de cette seconde femme.

Diodore,Bibliothèque historique, XVII, 2, 3, trad. abbé Jean Terrasson

L’avènement et l’affirmation politique et militaire d’Alexandre de Macédoine

 

336. Avènement d’Alexandre.

[160] Ἐπειδὴ δ’ ἐτελεύτησε μὲν Φίλιππος, Ἀλέξανδρος δ’ εἰς τὴν ἀρχὴν κατέστη, πάλιν αὖ τερατευόμενος, ἱερὰ μὲν ἱδρύσατο Παυσανίου, εἰς αἰτίαν δὲ εὐαγγελίων θυσίας τὴν βουλὴν κατέστησεν ποιῆσαι, ἐπωνυμίαν δ’ Ἀλεξάνδρῳ Μαργίτην ἐτίθετο, ἀπετόλμα δὲ λέγειν ὡς οὐ κινηθήσεται ἐκ Μακεδονίας· ἀγαπᾷν γὰρ αὐτὸν ἐν Πέλλῃ περιπατοῦντα, καὶ τὰ σπλάγχνα φυλάττοντα. Καὶ ταυτὶ λέγειν ἔφη οὐκ εἰκάζων, ἀλλ’ ἀκριβῶς εἰδώς, ὅτι αἵματός ἐστιν ἡ ἀρετὴ ὠνία, αὐτὸς οὐκ ἔχων αἷμα, καὶ θεωρῶν τὸν Ἀλέξανδρον οὐκ ἐκ τῆς Αλεξάνδρου φύσεως, ἀλλ’ ἐκ τῆς ἑαυτοῦ ἀνανδρίας.

[160] Cependant Philippe meurt assassiné, Alexandre lui succède ; Démosthène reprend le cours de ses impostures, dresse des autels à Pausanias, fait décerner par le sénat des réjouissances publiques, et le charge ainsi de l’opprobre d’une joie indécente. Il ne désignait plus le nouveau roi de Macédoine que par le nom de Margitès ; il assurait qu’il ne sortirait pas de son royaume, qu’il resterait dans Pella, uniquement occupé à promener et à conserver sa personne : "Et je n’assure point cela, disait-il, sur de simples conjectures ; je le sais avec certitude, puisque le courage ne s’achète qu’au prix du sang". Il parlait de la sorte, lui qui n’a pas de sang dans les veines, qui jugeait d’Alexandre, non par le caractère d’Alexandre, mais par sa propre lâcheté.

Eschine,Contre Ctésiphon, 160, trad. abbé Auger

336. L’intervention foudroyante d’Alexandre aux Thermopyles lui assure la succes­sion de son père à l’assemblée des Amphictyons. Proclamation d’Alexandre comme hègémônde la Ligue de Corinthe.

[4] πρὸς δὲ τὴν κατάπληξιν τῶν ἀπειθούντων ἦγε τὴν δύναμιν τῶν Μακεδόνων κεκοσμημένην καταπληκτικῶς. ὀξείαις δὲ ταῖς ὁδοιπορίαις χρησάμενος ἧκεν εἰς τὴν Βοιωτίαν καὶ πλησίον τῆς Καδμείας καταστρατοπεδεύσας ἐπέστησε πολὺν φόβον τῇ πόλει τῶν Θηβαίων. [5] καθ᾽ ὃν δὴ χρόνον Ἀθηναῖοι πυθόμενοι τὴν εἰς Βοιωτίαν πάροδον τοῦ βασιλέως τῆς προϋπαρχούσης καταφρονήσεως ἀπέστησαν : ἡ γὰρ ὀξύτης τοῦ νεανίσκου καὶ ἡ διὰ τῶν πράξεων ἐνέργεια τοὺς ἀλλοτριοφρονοῦντας μεγάλως ἐξέπληττεν. [6] διόπερ Ἀθηναῖοι τὰ μὲν ἀπὸ τῆς χώρας ἐψηφίσαντο κατακομίζειν, τῶν δὲ τειχῶν τὴν ἐνδεχομένην ἐπιμέλειαν ποιεῖσθαι. πρὸς δὲ τὸν Ἀλέξανδρον πρέσβεις ἐξαπέστειλαν, ἀξιοῦντες συγγνώμην ἔχειν, εἰ τὴν ἡγεμονίαν μὴ ταχέως συγχωροῦσιν. [7] ἐν δὲ τοῖς πρέσβεσι καὶ Δημοσθένης ἐκπεμφθεὶς οὐ συνῆλθε μετὰ τῶν ἄλλων πρὸς τὸν Ἀλέξανδρον, ἀλλ᾽ ἐκ τοῦ Κιθαιρῶνος ἀνέκαμψεν εἰς τὰς Ἀθήνας, εἴτε διὰ τὰ πεπολιτευμένα κατὰ Μακεδόνων φοβηθείς, εἴτε βουλόμενος τῷ βασιλεῖ τῶν Περσῶν ἄμεμπτον αὑτὸν διαφυλάττειν. [8] πολλὰ γὰρ χρήματά φασιν αὐτὸν εἰληφέναι παρὰ Περσῶν, ἵνα πολιτεύηται κατὰ Μακεδόνων : περὶ ὧν καὶ τὸν Αἰσχίνην φασὶν ὀνειδίζοντα τῷ Δημοσθένει κατά τινα λόγον τὴν δωροδοκίαν εἰπεῖν,“νῦν μέντοι τὴν δαπάνην ἐπικέκλυκεν αὐτοῦ τὸ βασιλικὸν χρυσίον. ἔσται δὲ οὐδὲ τοῦθ᾽ ἱκανόν : οὐδεὶς γὰρ πώποτε πλοῦτος τρόπου πονηροῦ περιεγένετο.” [9] ὁ δὲ Ἀλέξανδρος τοῖς πρέσβεσι τῶν Ἀθηναίων φιλανθρώπους ἀποκρίσεις δοὺς ἀπέλυσε τοῦ πολλοῦ φόβου τὸν δῆμον. τοῦ δ᾽ Ἀλεξάνδρου παραγγείλαντος εἰς Κόρινθον ἀπαντᾶν τάς τε πρεσβείας καὶ τοὺς συνέδρους, ἐπειδὴ συνῆλθον οἱ συνεδρεύειν εἰωθότες, διαλεχθεὶς ὁ βασιλεὺς καὶ λόγοις ἐπιεικέσι χρησάμενος ἔπεισε τοὺς Ἕλληνας ψηφίσασθαι στρατηγὸν αὐτοκράτορα τῆς Ἑλλάδος εἶναι τὸν Ἀλέξανδρον καὶ συστρατεύειν ἐπὶ τοὺς Πέρσας ὑπὲρ ὧν εἰς τοὺς Ἕλληνας ἐξήμαρτον. τυχὼν δὲ ταύτης τῆς τιμῆς ὁ βασιλεὺς ἐπανῆλθε μετὰ τῆς δυνάμεως εἰς Μακεδονίαν.

[4] et pour épouvanter les villes rebelles, il faisait passer à leur vue des troupes en bon ordre. Il vint lui- même ainsi accompagné et à grandes journées jusque dans la Béotie et s’étant campé à la vue de Cadmée il fit passer la crainte jusque dans Thèbes. [5] Les Athéniens, ayant appris ces nouvelles, revinrent bientôt du mépris qui les avait d’abord tranquillisés et la vigilance, aussi bien que la célérité de ce jeune prince, changea leurs idées sur son sujet. [6] Ils résolurent de faire apporter incessamment dans la ville les provisions qu’ils avaient à la campagne et de munir la ville même de détentes convenables. Ils envoyèrent à Alexandre des ambassadeurs, pour lui faire des excuses de n’avoir pas confirmé encore en sa personne, le titre de chef de la Grèce. [7] Démosthène qui était du nombre des députés ne pût se résoudre à aborder Alexandre et il revint de Cythéron à Athènes, soit qu’il craignit quelque fâcheux retour des invectives qu’il avait faites contre la Macédoine, ou qu’il voulut se disculper auprès du roi de Perse de la guerre qu’on préparait contre lui. [8] Car on disait qu’il avait reçu beaucoup d’argent de ce côté-là pour arrêter les projets des Macédoniens. C’est ce qu’on rapporte même qu’Eschine lui reprocha un jour, en disant L’or de la Perse lui fournit de quoi faire bien de la dépense. mais il n’en fera pas plus riche ; car rien ne suffit à un homme vicieux6. [9] Cependant Alexandre répondit si gracieusement à ces ambassadeurs, qu’il les mit eux et le peuple d’Athènes hors de toute crainte de sa part. Il, fit cependant convoquer en forme l’assemblée générale de Corinthe et quand tous les députés furent arrivés, il les engagea par des propos convenables à le nommer commandant-général de la Grèce contre les Perses, dont on avait sujet de se plaindre. Revêtu d’un titre si honorable, le roi s’en revint à la tête de ses troupes dans la Macédoine.

Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, XVII, 4, 4-9, trad. abbé Jean Terrasson

Révolte et destruction de Thèbes

 

335. Après deux campagnes victorieuses en Thrace et en Illyrie, qui le mènent jusqu’au Danube, Thèbes se sou­lève. En arrière-plan Memnon de Rhodes, au service de Darius III, inter­vient en Égée orientale, et le Roi, en promettant son aide financière – on pense aux fonds reçus par Démosthène – pousse les ci­tés grecques à un soulèvement contre les Macédoniens pour se libérer d’Alexandre qui se fait menaçant en Asie. Alexandre fond sur Thèbes. La cité est en­tièrement détruite, les habitants vendus comme es­claves, massacrés ou déportés. Après avoir terrorisé les Grecs par la destruction de Thèbes, Alexandre fut élu stra­tègos autocratorde la Grèce.

[2] περὶ ταῦτα δ᾽ ὄντος αὐτοῦ παρῆσάν τινες ἀπαγγέλλοντες πολλοὺς τῶν Ἑλλήνων νεωτερίζειν καὶ πολλὰς τῆς Ἑλλάδος πόλεις πρὸς ἀπόστασιν ὡρμηκέναι, μάλιστα δὲ Θηβαίους. ἐπὶ δὲ τούτοις ὁ βασιλεὺς παροξυνθεὶς ἐπανῆλθεν εἰς τὴν Μακεδονίαν, σπεύδων τὰς κατὰ τὴν Ἑλλάδα παῦσαι ταραχάς. [3] Θηβαίων δὲ τὴν ἐν τῇ Καδμείᾳ φρουρὰν ἐκβάλλειν φιλοτιμουμένων καὶ πολιορκούντων τὴν ἄκραν ἧκεν ὁ βασιλεὺς ἄφνω πρὸς τὴν πόλιν καὶ κατεστρατοπέδευσε πλησίον τῶν Θηβῶν μετὰ πάσης τῆς δυνάμεως. [4] οἱ δὲ Θηβαῖοι πρὸ μὲν τῆς τοῦ βασιλέως παρουσίας τὴν Καδμείαν τάφροις βαθείαις καὶ σταυρώμασι πυκνοῖς περιέλαβον ὥστε μήτε βοήθειαν αὐτοῖς δύνασθαι μήτ᾽ ἀγορὰν εἰσπέμψαι, [5] πρὸς δὲ Ἀρκάδας καὶ Ἀργείους, ἔτι δὲ Ἠλείους πρεσβεύσαντες ἠξίουν βοηθεῖν. ὁμοίως δὲ καὶ πρὸς Ἀθηναίους περὶ συμμαχίας ἐπρέσβευον καὶ παρὰ Δημοσθένους ὅπλων πλῆθος ἐν δωρεαῖς λαβόντες τοὺς ἀνόπλους καθώπλιζον. [6] τῶν δ᾽ ἐπὶ τὴν βοήθειαν παρακεκλημένων οἱ μὲν ἐν Πελοποννήσῳ στρατιώτας ἐξέπεμψαν ἐπὶ τὸν Ἰσθμὸν καὶ διατρίβοντες ἐκαραδόκουν, προσδοκίμου τοῦ βασιλέως ὄντος. Ἀθηναῖοι δ᾽ ἐψηφίσαντο μὲν βοηθεῖν τοῖς Θηβαίοις, πεισθέντες ὑπὸ Δημοσθένους, οὐ μέντοι γε τὴν δύναμιν ἐξέπεμψαν, καραδοκοῦντες τὴν ῥοπὴν τοῦ πολέμου. [7] ὁ δὲ τῆς ἐν τῇ Καδμείᾳ φρουρᾶς ἡγούμενος Φιλώτας ὁρῶν τοὺς Θηβαίους μεγάλας παρασκευὰς ποιουμένους πρὸς τὴν πολιορκίαν καὶ τὰ τείχη φιλοτιμότερον κατεσκεύασεν καὶ βελῶν παντοδαπῶν πλῆθος ἡτοιμάζετο. [IX] ἐπεὶ δ᾽ ὁ βασιλεὺς ἀνελπίστως ἐκ τῆς Θρᾴκης ἧκε μετὰ πάσης τῆς δυνάμεως, αἱ μὲν συμμαχίαι τοῖς Θηβαίοις δισταζομένην εἶχον τὴν παρουσίαν, ἡ δὲ τῶν πολεμίων δύναμις ὁμολογουμένην καὶ φανερὰν ἐποιεῖτο τὴν ὑπεροχήν. τότε δὲ συνεδρεύσαντες οἱ ἡγεμόνες προεβουλεύσαντο περὶ τοῦ πολέμου καὶ πᾶσιν ἔδοξεν ὑπὲρ τῆς αὐτονομίας διαγωνίζεσθαι. τοῦ δὲ πλήθους ἐπικυρώσαντος τὴν γνώμην ἅπαντες μετὰ πολλῆς προθυμίας εἶχον ἑτοίμως διακινδυνεύειν. [2] ὁ δὲ βασιλεὺς τὸ μὲν πρῶτον ἡσυχίαν ἦγε, διδοὺς μετανοίας χρόνον εἰς τὸ βουλεύσασθαι καὶ νομίζων μὴ τολμήσειν μίαν πόλιν πρὸς τηλικαύτην δύναμιν παρατάξασθαι. [3] εἶχε γὰρ ὁ Ἀλέξανδρος κατὰ τοῦτον τὸν καιρὸν πεζοὺς μὲν πλείους τῶν τρισμυρίων, ἱππεῖς δ᾽ οὐκ ἐλάττους τρισχιλίων, πάντας δ᾽ ἐνηθληκότας τοῖς πολεμικοῖς κινδύνοις καὶ συνεστρατευμένους Φιλίππῳ καὶ σχεδὸν ἐν πάσαις ταῖς μάχαις ἀηττήτους γεγονότας : ὧν δὴ ταῖς ἀρεταῖς καὶ προθυμίαις πεποιθὼς Ἀλέξανδρος ἐπεβάλετο καταλῦσαι τὴν τῶν Περσῶν ἡγεμονίαν. [4] εἰ μὲν οὖν οἱ Θηβαῖοι τοῖς καιροῖς εἴξαντες διεπρεσβεύοντο πρὸς τοὺς Μακεδόνας ὑπὲρ εἰρήνης καὶ συνθέσεως, ἡδέως ἂν ὁ βασιλεὺς προσεδέξατο τὰς ἐντεύξεις καὶ πάντα ἂν ἀξιούμενος συνεχώρησεν : ἐπεθύμει γὰρ τὰς κατὰ τὴν Ἑλλάδα ταραχὰς ἀποτριψάμενος ἀπερίσπαστον ἔχειν τὸν πρὸς τοὺς Πέρσας πόλεμον : νῦν δὲ δόξας ὑπὸ τῶν Θηβαίων καταφρονεῖσθαι διέγνω τὴν πόλιν ἄρδην ἀνελεῖν καὶ τῷ φόβῳ τούτῳ τὰς ὁρμὰς τῶν ἀφίστασθαι τολμώντων ἀποτρέψαι. [5] διόπερ τὴν δύναμιν ἑτοίμην κατασκευάσας πρὸς τὸν κίνδυνον ἐκήρυξε τὸν βουλόμενον Θηβαίων ἀπιέναι πρὸς αὐτὸν καὶ μετέχειν τῆς κοινῆς τοῖς Ἕλλησιν εἰρήνης. οἱ δὲ Θηβαῖοι διαφιλοτιμηθέντες ἀντεκήρυξαν ἀπό τινος ὑψηλοῦ πύργου τὸν βουλόμενον μετὰ τοῦ μεγάλου βασιλέως καὶ Θηβαίων ἐλευθεροῦν τοὺς Ἕλληνας καὶ καταλύειν τὸν τῆς Ἑλλάδος τύραννον παριέναι πρὸς αὐτούς. [6] ὅθεν Ἀλέξανδρος περιαλγὴς γενόμενος εἰς ὑπερβάλλουσαν ὀργὴν προῆλθεν καὶ πάσῃ τιμωρίᾳ τοὺς Θηβαίους μετελθεῖν ἔκρινεν. οὗτος μὲν οὖν ἀποθηριωθεὶς τὴν ψυχὴν μηχανάς τε πολιορκητικὰς συνεστήσατο καὶ τἄλλα πρὸς τὸν κίνδυνον παρεσκευάζετο.

 [2] Dans le temps même de cette expédition, ou de cette course, il reçut avis que plusieurs d’entre les ville grecques, et surtout les Thébains songeaient à des nouveautés et à se rendre indépendants. Le roi très mécontent revint aussitôt dans la Macédoine pour apaiser ces troubles nouveaux. [3] Les Thébains en effet assiégeaient déjà Cadmée7 pour en chasser la garnison Macédonienne, lorsque le roi vint camper tout d’un coup devant Thèbes même avec toute l’armée qu’il ramenait. [4] Les Thébains avaient déjà environné la citadelle qu’ils voulaient reprendre, de fossés profonds et de hautes palissades, de sorte qu’il était impossible d’y faire entrer ni secours ni vivres. [5] Outre cela ils avaient demandé des troupes aux Arcadiens, aux Argiens et aux Éléens ; mais surtout aux Athéniens et Démosthène en particulier leur avait fait présent d’une grande quantité d’armes, dont ils avaient déjà revêtu ceux d’entre eux qui n’en avaient pas. [6] Entre les peuples dont les Thébains avaient recherché l’alliance, les habitants du Péloponnèse avaient envoyé jusque dans l’Isthme des soldats qui avaient ordre d’attendre là que le roi fut arrivé. Les Athéniens animés par Démosthène, avaient bien décidé qu’ils enverraient du secours aux Thébains ; mais avant l’exécution ils étaient bien aises de voir quel cours prendraient les choses. [7] Philotas qui commandait dans Cadmée et qui s’était muni d’avance de toute sorte d’armes, sachant les préparatifs des Thébains, se préparait de son côté à la défense, faisait bien garder les murailles et se munissait de toutes sortes d’armes, [IX] lorsque le roi arriva tout d’un coup avec toutes ses forces, de son expédition de Thrace. Son armée bien réunie et n’ayant qu’un seul objet, se montra aux alliés des Thébains encore incertains et irrésolus. Cependant leurs chefs assemblés prirent hardiment le parti d’une défense ouverte et du maintien de la liberté publique. Les peuples appuyaient cette décision et se portaient d’eux-mêmes à la guerre. [2] Le roi se tint quelque temps sans agir, pour donner aux Thébains le temps de se raviser ne présumant point qu’une ville seule entreprît de résister à une armée comme la sienne. [3] Car Alexandre avait alors plus de trente mille hommes d’infanterie et trois mille cavaliers, tous formés à la guerre, qui avaient déjà combattu sous Philippe son père, qui étaient sortis victorieux de presque tous les combats qu’ils avaient donnés et avec lesquels Alexandre comptait dès lors de renverser la monarchie des Perses. [4] Si les Thébains, se prêtant alors aux circonstances des choses, avaient fait quelques démarches pour avoir la paix, le roi aurait reçu favorablement leurs propositions et se serait même relâché sur bien des articles : car il avait un véritable désir de laisser la Grèce tranquille et de n’être détourné par rien de son entreprise capitale. Mais se voyant en quelque sorte joué par les Thébains, il résolut de détruire cette ville et de donner en elle un exemple redoutable aux séditieux. [5] C’est pourquoi ayant mis son armée en ordre pour les attaquer, il envoya d’abord un héraut pour déclarer qu’il recevrait favorablement tout Thébain qui voudrait passer dans son camp et jouir de la tranquillité qui régnait dans le reste de la Grèce. Les Thébains piqués de cette annonce firent publier du haut d’une tour que quiconque voudrait se joindre au grand roi et aux Thébains pour délivrer la Grèce de son tyran serait bien reçu dans leur ville. [6] Alexandre outré de cette démarche, se laissa emporter à sa colère et résolut de tirer une pleine vengeance des Thébains. Il fit faire des machines énormes et prépara contre eux une attaque formidable.

Diodore de Sicile, Bibliothèque historique, XVII, 8, 2 – 9, 6, rad. abbé Jean Terrasson

Trois jours, selon Diodore, suffirent au roi pour achever les préparatifs du siège. Voici l’assaut final raconté par Arrien :

[1,8] […] κἀν τούτῳ Ἀλέξανδρος τοὺς μὲν αὑτοῦ φεύγοντας κατιδών, τοὺς Θηβαίους δὲ λελυκότας ἐν τῇ διώξει τὴν τάξιν, ἐμβάλλει ἐς αὐτοὺς συντεταγμένῃ τῇ φάλαγγι. οἱ δὲ ὠθοῦσι τοὺς Θηβαίους εἴσω τῶν πυλῶν. καὶ τοῖς Θηβαίοις ἐς τοσόνδε ἡ φυγὴ φοβερὰ ἐγίγνετο, ὥστε διὰ τῶν πυλῶν ὠθούμενοι ἐς τὴν πόλιν οὐκ ἔφθησαν συγκλεῖσαι τὰς πύλας. ἀλλὰ συνεσπίπτουσι γὰρ αὐτοῖς εἴσω τοῦ τείχους ὅσοι τῶν Μακεδόνων ἐγγὺς φευγόντων εἴχοντο, ἅτε καὶ τῶν τειχῶν διὰ τὰς προφυλακὰς τὰς πολλὰς ἐρήμων ὄντων. καὶ παρελθόντες ἐς τὴν Καδμείαν οἱ μὲν ἐκεῖθεν κατὰ τὸ Ἀμφεῖον σὺν τοῖς κατέχουσι τὴν Καδμείαν ἐξέβαινον ἐς τὴν ἄλλην πόλιν, οἱ δὲ κατὰ τὰ τείχη, ἐχόμενα ἤδη πρὸς τῶν συνεισπεσόντων τοῖς φεύγουσιν, ὑπερβάντες ἐς τὴν ἀγορὰν δρόμῳ ἐφέροντο. καὶ ὀλίγον μέν τινα χρόνον ἔμειναν οἱ τεταγμένοι τῶν Θηβαίων κατὰ τὸ Ἀμφεῖον. ὡς δὲ πανταχόθεν αὐτοῖς οἱ Μακεδόνες καὶ Ἀλέξανδρος ἄλλοτε ἄλλῃ ἐπιφαινόμενος προσέκειντο, οἱ μὲν ἱππεῖς τῶν Θηβαίων διεκπεσόντες διὰ τῆς πόλεως ἐς τὸ πεδίον ἐξέπιπτον, οἱ δὲ πεζοὶ ὡς ἑκάστοις προὐχώρει ἐσώζοντο. ἔνθα δὴ ὀργῇ οὐχ οὕτως τι οἱ Μακεδόνες, ἀλλὰ Φωκεῖς τε καὶ Πλαταιεῖς καὶ οἱ ἄλλοι δὲ Βοιωτοὶ οὐδὲ ἀμυνομένους τοὺς Θηβαίους ἔτι οὐδενὶ κόσμῳ ἔκτεινον, τοὺς μὲν ἐν ταῖς οἰκίαις ἐπεισπίπτοντες, οὓς δὲ ἐς ἀλκὴν τετραμμένους, τοὺς δὲ καὶ πρὸς ἱεροῖς ἱκετεύοντας, οὔτε γυναικῶν οὔτε παίδων φειδόμενοι.

[1,8] […] À la vue de la retraite de ses troupes, et de la confusion qui règne dans la poursuite des Thébains, Alexandre fait donner la phalange, et les repousse jusques dans leurs murs. La terreur et le désordre des fuyards furent si grands, qu’ils ne songèrent point à fermer les portes ; l’ennemi entre avec eux dans la ville, dégarnie de soldats qui la plupart s’étaient portés aux avant-postes. Les Macédoniens s’étant avancés aux pieds de la citadelle, quelques-uns d’entre eux se réunissent à la garnison et pénètrent dans la ville du côté du temple d’Amphion ; tandis que d’autres, se dirigeant le long des remparts déjà occupés par les leurs, courent s’emparer de la place publique. Les Thébains, qui défendaient le temple d’Amphion, résistèrent d’abord ; mais, enveloppés par les Macédoniens et par Alexandre qu’ils rencontrent de tous côtés, ils se débandent, la cavalerie gagna la campagne, l’infanterie se sauva comme elle put. Cependant le vainqueur irrité fait un horrible carnage des Thébains qui ne résistent plus. On doit moins l’attribuer aux Macédoniens, qu’à ceux de Platée, de la Phocide et autres de la Béotie. On égorge les uns au sein de leurs foyers, les autres aux pieds des autels ; la résistance et la prière sont inutiles : on n’épargna ni les femmes, ni les enfants.

Arrien,Anabase, I, 8-9, trad. François-Charles Liskenne et Jean-Baptiste Sauvan, éd. Anselin, 1835

[133] Θῆβαι δέ, Θῆβαι, πόλις ἀστυγείτων, μεθ’ ἡμέραν μίαν ἐκ μέσης τῆς Ἑλλάδος ἀνήρπασται, εἰ καὶ δικαίως, περὶ τῶν ὅλων οὐκ ὀρθῶς βουλευσάμενοι, ἀλλὰ τήν γε θεοβλάβειαν καὶ τὴν ἀφροσύνην οὐκ ἀνθρωπίνως, ἀλλὰ δαιμονίως κτησάμενοι; Λακεδαιμόνιοι δ’ οἱ ταλαίπωροι, προσαψάμενοι μόνον τούτων τῶν πραγμάτων ἐξ ἀρχῆς περὶ τὴν τοῦ ἱεροῦ κατάληψιν, οἱ τῶν Ἑλλήνων ποτὲ ἀξιοῦντες ἡγεμόνες εἶναι, νῦν ὁμηρεύσοντες, καὶ τῆς συμφορᾶς ἐπίδειξιν ποιησόμενοι, μέλλουσιν ὡς Ἀλέξανδρον ἀναπέμπεσθαι, τοῦτο πεισόμενοι, καὶ αὐτοὶ καὶ ἡ πατρίς, ὅ τι ἂν ἐκείνῳ δόξῃ, καὶ ἐν τῇ τοῦ κρατοῦντος καὶ προηδικημένου μετριότητι κριθησόμενοι ;

133. Thèbes, ville voisine, Thèbes n’a-t-elle pas disparu en un seul jour du milieu de la Grèce ? Quoique les Thébains aient manqué de prudence et de sagesse dans les affaires de la nation, ce n’est pas, toutefois, à une cause naturelle qu’on doit attribuer leur désastre, mais à un vertige qui leur a été envoyé par les dieux, et à un aveuglement dont ils les ont frappés. Les malheureux Lacédémoniens, qui n’ont eu que la plus modique part au premier pillage du temple, les Lacédémoniens, qui prétendaient, jadis, commander aux Grecs, ne vont-ils pas bientôt trouver Alexandre en qualité d’otages, traîner partout le spectacle de leurs disgrâces, se mettre à la merci du jeune prince, eux et leur patrie, s’abandonner à la discrétion d’un vainqueur qu’ils ont offensé ?

Eschine,Contre Ctésiphon, 133, trad. abbé Auger

La levée des cités grecques pour marcher sur l’Asie

 

335. La Grèce dominée, Alexandre peut marcher contre l’Asie. Le Conseil de la Ligue de Corinthe, réuni à nouveau, le confirme comme hégémôndes Grecs pour l’expédition contre les Perses, titre accordé précédemment à son père. La contribution de chaque cité y est précisée.

Pierre de marbre pentélique trouvée sur le versant nord de l’Acropole. Cette inscription très altérée est un témoi­gnage d’un traité qui règle les modalités de la participation des Athéniens à l’expédition d’Alexandre.

« […]

[…] envoi […]

[…] à chaque homme […]

[…] ceux qui viendront […]

[…] d’où ils pourront trouver du grain […]

[…] Alexandre […]

[…] au fantassin lourd, une drachme, et au […]

[…] par jour ; envoyer […]

[…] qui auront besoin d’un contingent […]

[…]

[…] pour dix jours, en leur fournissant le blé […]

[…]

[…] ériger à Pydna et à Athènes […]. »

Inscription historique grecque.

Une relation ambiguë des cités grecques vis-à-vis de leur nouvel hégémôn

 

Mais, comme on le verra, le jeu des cités grecques avec Alexandre est ambigu. Cette inscription, sur une stèle particulièrement abîmée (327/326), honore Memnon de Rhodes, un parent (le fils ?) de Memnon le stratègede la flotte perse mort en 333. Il est remarquable qu’au même moment Alexandre se bat en Inde ou approche des rives de l’Hyphase.

« Sous l’archontat d’Hégémon, la tribu d’Hippoponthis exerçait la septième prytanie, Autoclès fils d’Au­tios d’Acharnes était secrétaire, le deuxième jour avant la fin du mois, vingt-sixième de la prytanie, assem­blée principale, […] du bureau a mis aux voix, il a plu au peuple : attendu que Memnon [… 11 lignes…] et que ses ancêtres Pharnabaze et Artabaze n’ont cessé de procurer des bienfaits au peuple des Athéniens et de lui rendre service durant les guerres, que le père de Thymondas, Mentor, a sauvé les soldats grecs faisant cam­pagne en Égypte, quand l’Égypte fut prise par les Perses ; qu’il reçoive l’éloge et qu’il soit couronné d’une cou­ronne d’or […]. »

Inscription historique grecque.

NOTES

  1. Voir Lycurgue, Contre Léocrate, 53.
  2. Voir Démosthène, Sur la Couronne, 248.
  3. Voir Diodore, XVI, 94, 4.
  4. Olympias, à l’avènement d’Alexandre, fait égorger Cléopâtre et son enfant qui venait de naître. Attale est assassiné.
  5. Voir aussi Plutarque, Alexandre, 9 et 10, 8 ; Athénée, 13, 557 e ; Pausanias, 8, 7, 7.
  6. Voir Eschine, Contre Ctésiphon, 173.
  7. L’acropole de Thèbes
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