- La citoyenneté de naissance : loi de 451

En 451, sur proposition de Périclès, l'Assemblée adopte un décret qui durcit les conditions d'accès à la citoyenneté par la naissance.

Avant cette loi, il suffisait d'avoir un père athénien pour être citoyen de plein droit.
La nouvelle loi impose une double origine athénienne en ajoutant l'obligation d'une filiation maternelle.
A partir de 451, il faut donc avoir un père et une mère athéniens libres et, de surcroît, unis par un mariage légitime. Ceci exclut tous les candidats à la citoyenneté nés de l'union d'un père athénien avec une étrangère. Si cette mesure était entrée en vigueur plus tôt, des hommes politiques aussi éminents que Clisthène, Thémistocle ou Cimon, dont les mères étaient de Sicyone ou de Thrace, n'auraient pas été citoyens.

On se demande encore quelle était l'intention réelle de Périclès qui descendait lui-même par sa branche maternelle d'une famille de Sicyone et qui avait un fils issu de son union avec Aspasie, d'origine milésienne. Pour Aristote, il s'agissait avant tout de réduire le nombre de citoyens, devenu trop important à cette époque. D'autres ont vu là des motivations privées ou des considérations politiciennes purement circonstancielles visant à priver des rivaux de leurs droits civiques.

Sans doute est-il préférable de chercher des motifs politiques et de voir les conséquences de cette modification sur la vie politique de la cité.

La mesure est-elle discriminatoire ?

A première vue, oui, puisqu'elle diminue le nombre des citoyens en excluant davantage de candidats potentiels et en instituant une catégorie particulière. Il faut noter cependant que cette exclusion, comme toute loi votée à Athènes, n'avait pas d'effet rétroactif ; aucun citoyen actif n'a donc pu se trouver déchu de ses droits civiques. Il est plus difficile de savoir ce qu'il est advenu des enfants et des adolescents nés avant 451 mais encore mineurs à cette date.

Qui se trouve exclu ?

En toute logique, cette mesure ne visait que les Athéniens susceptibles de s'unir avec des familles non athéniennes. Or, ceux-ci étaient peu nombreux. En revanche, ils appartenaient sans nul doute à la classe aristocratique qui cherchait fréquemment à s'allier par le mariage avec de grandes familles des cités rivales. Fantasme ou réalité, dans une Athènes en guerre avec ses voisins, et dont le régime démocratique a toujours été contesté de l'intérieur ? Toujours est-il que la mesure de Périclès s'inscrit bien dans une volonté politique.

La mesure est-elle idéologique ?

Paradoxe : après 451, la femme athénienne, quoique non-citoyenne, transmet désormais la citoyenneté à part égale avec l'homme. Pourquoi ? Ne nous trompons pas d'époque : Périclès n'était pas féministe et il ne s'agissait nullement d'accorder à la femme un droit à la citoyenneté.
Aristote nous dit que "sous Antidotos, à cause du nombre croissant de citoyens et sur la proposition de Périclès, on décida de ne pas laisser jouir de droits politiques quiconque ne serait pas né de deux "citoyens". Le terme grec est employé au duel, ce qui confère incontestablement à la femme un rôle identique à celui de son mari mais Aristote dit "ἀστοῖν" et non "πολιταῖν".Il s'agissait donc d'une citoyenneté civile et non politique (voir l'analyse des deux termes dans la page "Qui est citoyen ?)
Ce que la loi de Périclès exige désormais, c'est le double enracinement dans la terre de l'Attique. Elle insiste par là sur le lien entre la politeia et la terre commune, la terre-mère, remettant au cœur de la citoyenneté la notion d'autochtonie.

La loi de 451 n'est donc pas circonstancielle. Elle a très certainement un fondement politique et idéologique . La preuve en est qu'établie, aux dires d'Aristote, à une époque où il y avait trop de citoyens, elle ne fut jamais abolie ni même assouplie, durant tout le IV° siècle où la cité souffrit au contraire d'un manque de citoyens.

musagora

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