Héphaïstos, dieu forgeron de l’Olympe

Fils de Zeus et d’Héra, ou d’Héra seule, Héphaïstos est le dieu de la métallurgie et des volcans dont il maîtrise le feu souterrain. Les Romains l’appellent Vulcain. Il est représenté comme un simple artisan, portant la tunique courte et le pilos (bonnet conique) traditionnels ; il manie les outils du forgeron : marteau, enclume, double hache, tenailles. Il passe aussi pour le dieu le plus laid : mal proportionné, trapu, barbu et velu, il boite.

Le divin boiteux

Selon la légende, Héra voulant rivaliser avec son époux infidèle met au monde un fils si chétif qu’elle le jette à la mer, vexée d’avoir accouché d’un enfant dépourvu de vigueur. Les nymphes Thétis et Eurynomé le recueillent et l’élèvent dans une grotte sous-marine. Selon une autre version légendaire, Héphaïstos, qui n’est encore qu’un enfant, prend le parti de sa mère au cours d’une scène de ménage et c’est Zeus qui le saisit par le pied pour le lancer au loin, du haut de l’Olympe. Quelle qu’en soit la cause, cette chute a deux conséquences : d’abord le jeune dieu reste infirme et boiteux ; ensuite, il apprend à connaître et à maîtriser le feu souterrain. Pendant son exil, en effet, il devient un orfèvre et un forgeron hors pair, auquel les dieux passeront souvent commande après son retour parmi eux.
Grâce à son habileté, Héphaïstos obtient de revenir sur l’Olympe. Il fabrique un magnifique trône d’or qu’il offre à sa mère, mais c’est un cadeau enchanté : Héra se retrouve ligotée par des liens invisibles dès qu’elle s’est assise sur ce siège. L’assemblée des dieux s’émeut : il faut retrouver Héphaïstos qui a pris la fuite. Arès essaie de le ramener de force, mais il est mis en déroute par un jet de métal en fusion. Dionysos réussit à le persuader, après l’avoir enivré disent certains, et le ramène sur un âne. Pour délivrer Héra, « le divin boiteux », selon l’expression homérique, exige d’être reconnu par ses parents : comme signe de sa réintégration parmi les Olympiens, il obtient en mariage la plus belle des déesses, Aphrodite.

Le mari trompé

Le mariage est fort mal assorti et Aphrodite se hâte de prendre le bel Arès comme amant. Mais là encore, Héphaïstos utilise un piège de son invention pour confondre son épouse. Il prétexte un déplacement après avoir équipé le lit conjugal d’un filet métallique invisible qui s’abat sur le couple adultère. Tous les dieux sont là, conviés au spectacle par le mari trompé, et ils éclatent d’un rire tonitruant - le fameux « rire homérique ». Mais Héphaïstos les prend à témoin : il réclame la restitution de la dot qu’il a versée (dans l’Antiquité, c’est le futur époux qui faisait de riches présents à sa belle famille pour obtenir la main de la jeune fille). Poséidon se porte garant et obtient la libération des amants : on peut voir là le premier divorce officiel dans la civilisation gréco-romaine. En effet, Aphrodite poursuit sa relation avec Arès, à qui elle donne plusieurs enfants, alors qu’elle n’a conçu aucun rejeton de son époux légitime. Quant à Héphaïstos, Hésiode et Homère lui attribuent une nouvelle épouse : Aglaé ou Charis, l’une des trois Grâces, dont il a quatre charmantes filles.
Selon une légende athénienne, le dieu forgeron est pris de désir pour Athéna, peut-être parce qu’il a aidé Zeus à l’extraire de son crâne, peut-être aussi parce que ses talents le rapprochent de la déesse protectrice des arts et métiers. Un jour où Athéna vient lui commander des armes, il tente de la violer : elle le repousse, mais du sperme du dieu tombé sur le sol naît Érichthonios, considéré comme le premier roi autochtone d’Athènes. On attribue aussi à Héphaïstos quelques autres enfants, dont les Cabires, des demi-dieux qui auraient accompagné Dionysos en Inde.

Le champion de la technè

Plus que le récit de ses mésaventures, c’est la description de ses chefs-d’œuvre qui fait la célébrité d’Héphaïstos : le bouclier d’Achille, l’armure d’Énée, le palais d’Hélios sont autant de morceaux d’anthologie poétique. Quand les dieux veulent offrir un cadeau de noces à Thétis et Pelée, ou à Dionysos et Ariane, c’est encore à lui qu’ils font appel. Mais il met aussi son art au service de la vengeance et ses présents peuvent être maléfiques, comme le trône d’Héra ou le collier qu’il fabrique pour Harmonie, la fille d’Aphrodite et d’Arès, son rival, et qui porte malheur sur plusieurs générations.
Héphaïstos est le « technicien » par excellence : un artiste / artisan expert en métallurgie et en mécanique, capable d’animer ses créations. Il forge ainsi les premiers automates : deux servantes d’or qui le soutiennent dans son atelier, mais aussi les chiens d’or et d’argent d’Alkinoos (roi des Phéaciens), les taureaux de bronze d’Aiétès (roi de Colchide) et bien d’autres encore. Il aurait aussi participé à la création de Pandore, la première femme. On reconnaît son art dans la couronne d’or qu’il lui a ciselée.

τρίποδας γὰρ ἐείκοσι πάντας ἔτευχεν
ἑστάμεναι περὶ τοῖχον ἐϋσταθέος μεγάροιο,
χρύσεα δέ σφ᾽ ὑπὸ κύκλα ἑκάστῳ πυθμένι θῆκεν,
ὄφρά οἱ αὐτόματοι θεῖον δυσαίατ᾽ ἀγῶνα
ἠδ᾽ αὖτις πρὸς δῶμα νεοίατο θαῦμα ἰδέσθαι.

 

Il était en train de fabriquer vingt trépieds en tout
qui doivent se dresser contre le mur du palais bien construit,
il a mis des roulettes en or à la base de chacun d’eux,
afin qu’ils puissent entrer par eux-mêmes, de manière automatique, dans l’assemblée des dieux,
puis revenir à la maison de la même façon - merveille à voir !

 

Homère (VIIIe siècle avant J.-C.), Iliade, chant XVIII, vers 369 - 377

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